• lisson

     Londres, 1895. Thomas Pitt poursuit sur le continent l'homme qui vient, sous ses yeux, d'assassiner l'informateur qui devait lui donner des renseignements sur un complot anarchiste. Pendant ce temps son chef aux services secrets, Victor Narraway, est accusé d'avoir détourné de l'argent et démis de ses fonctions. Il prétend qu'il est innocent et que c'est un complot pour se débarrasser de lui. Convaincue de sa bonne foi Charlotte, la femme de Thomas, décide de l'aider et de l'accompagner pour cela en Irlande où il pense pouvoir trouver les preuves dont il a besoin. Un tel voyage est très inconvenant aussi se fait-elle passer pour sa soeur. Charlotte va se sentir quand même bien embarrassée quand elle découvre que Victor éprouve beaucoup plus que de la sympathie pour elle.

     

    En cette fin du 19° siècle socialistes et anarchistes s'agitent de plus en plus en Europe et les vieilles monarchies sont dans le collimateur. Mais nos héros sont tous de fidèles partisans du régime britannique et s'ils conçoivent qu'on en ait après le tsar et son régime rétrograde, ils sont convaincus que la reine d'Angleterre est le meilleur garant des libertés. Des réformes, oui mais sans tout renverser.

     

    J'ai beaucoup apprécié ce 26° épisode des aventures de Charlotte et Thomas. Ici ce cher Thomas fait plutôt de la figuration et d'une façon générale ce sont les femmes les personnages forts. Cela fait si longtemps qu'elle est commencée cette série que cela m'a donné envie de relire le numéro un pour voir comment les personnages avaient évolué.

     

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  • Florence Aubenas, Le quai de Ouistreham, éditions de l'olivierEn février 2009 Florence Aubenas est partie incognito à Caen pour y chercher du travail et y vivre la vie de demandeuse d'emploi. Elle a prétendu avoir son bac pour seul diplôme, avoir vécu longtemps avec un homme qui l'entretenait mais s'être séparée récemment. Elle a gardé son nom mais teint ses cheveux. Elle avait décidé qu'elle arrêterait l'expérience quand elle décrocherait un CDI, cela a duré six mois.

     

    Pendant six mois Florence Aubenas a donc fréquenté pôle emploi et ses employés de plus en plus astreints au rendement. Elle a obtenu des heures de ménage à droite et à gauche : sur les ferry du quai de Ouistreham qui passent pour les endroits les plus durs; dans un camping où six heures de ménage sont payées trois; dans diverses entreprises perdues dans ce qu'il reste des zones industrielles de la région. Elle a fait connaissance avec ses collègues de galère qui font deux heures de route pour une heure de travail, que l'on peut appeler à tout instant pour un remplacement au pied levé et pas question de dire non.

     

    Voilà un livre qui se lit facilement, vivant par les histoires qu'il raconte. On n'est pas dans l'East end de Jack London mais dans des vies quand même bien dures où le travail fait mal. On y rencontre des personnes qui se battent malgré les difficultés et qui s'épaulent. Florence Aubenas porte un regard bienveillant sur ces gens qu'elle a côtoyés. L'ensemble est donc sympathique même si le contenu n'est pas une révélation : les conditions de vie des précaires je pense qu'on les connaît déjà, soit par des reportages dans la presse, soit par ses fréquentations dans la vraie vie.

     

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  • MILLE-SOLEILS-SPLENDIDES-copie-1.gif

     Laila, une jeune afghane, est née à Kaboul le jour de la prise de pouvoir des communistes, en 1978. Elle grandit dans une famille traumatisée par le départ des deux fils aînés au djihad mais heureusement elle a son ami Tariq dont elle est inséparable. En grandissant l'amitié de Tariq et Laila se transforme en amour, cependant, à 14 ans, elle se voit obligée d'épouser un homme de 60 ans et qui a déjà une femme, Mariam, beaucoup, plus jeune que lui elle aussi. Au départ Mariam traite Laila avec rudesse puis les deux femmes découvrent qu'elles peuvent s'unir contre la violence de leur mari.

     

    Après Les cerfs-volants de Kaboul c'est encore une histoire terrible que Khaled Hosseini nous raconte là. Les deux principaux personnages féminins sont les victimes de la violence masculine, encore amplifiée par l'arrivée au pouvoir des talibans. L'auteur montre aussi que quand les victimes cessent de se considérer comme telles, elles peuvent prendre en main leurs vies, même dans des circonstances dramatiques. Les bouleversements subis par l'Afghanistan depuis 30 ans forment la trame de ce roman. Les événements sont rappelés simplement, ce qui est bienvenu. J'ai bien aimé.

     

     

     

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  • Kurban Saïd, Ali et Nino, Le grand livre du mois (existe aussi chez J'ai lu)Ecrit en 1937 par Kurban Saïd alias Lev Nussimbaum dont je viens de lire la biographie, Ali et Nino est l'histoire d'amour de Ali, un musulman chiite et de Nino, une chrétienne géorgienne. Cela se passe à Bakou en Azerbaïdjan, avant, pendant et juste après la première guerre mondiale. Ali et Nino se connaissent et sont amoureux l'un de l'autre depuis leur adolescence. Bien sur ils ne sont pas de la même religion ce qui gêne un peu leurs proches mais ce n'est pas un obstacle majeur à leur union.

     

    Ils connaissent les difficultés classiques des couples mixtes. Elle a eu une éducation européenne, lui orientale : elle mange à table avec une fourchette, lui par terre avec la main et chacun pense que ce sont ses façons qui sont les plus raffinées. Mais ils sont jeunes et ils s'aiment ce qui leur permet de surmonter beaucoup de choses. Par contre les événements qui frappent leur pays à la fin de la guerre et à cause de la révolution russe vont les toucher durement.

     

    J'ai plutôt apprécié ce roman bien écrit et agréable à lire. Il y a de belles descriptions et une pointe d'humour pince sans rire. Après L'orientaliste, c'est un nouveau regard porté sur l'Azerbaïdjan, pays que je viens de découvrir, et son histoire mouvementée à cette époque.

     

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  • orientaliste

     En 1998 Tom Reiss se rend en Azerbaïdjan pour son travail. Avant de partir il cherche à se documenter sur le pays. On lui conseille la lecture d'un roman écrit en 1937, Ali et Nino, dont l'action se déroule en partie à Bakou. Sur place, Tom Reiss découvre qu'Ali et Nino fait figure de roman national mais que personne ne sait qui est l'auteur qui se cache derrière le pseudonyme de Kurban Saïd. Il décide de mener l'enquête. Il trouve que Kurban Saïd, qui se fait aussi appeler Essad Bey, est en fait Lev Nussimbaum.

     

    Né en 1905 Lev Nussimbaum a grandi à Bakou. Sa mère est morte quand il était tout jeune, son père est un magnat du pétrole. Au début du 20° siècle l'Azerbaïdjan est la première région productrice de pétrole du monde. Dans ce pays le pétrole suinte du sol et les collines s'enflamment spontanément. On devient riche en piochant son champ. Cette situation a donné naissance à une société cosmopolite. Hommes d'affaires chrétiens, musulmans et juifs (comme les Nussimbaum) se fréquentent sans souci de leurs origines. Ils se font construire de splendides villas, un opéra, un casino et Bakou passe pour un petit Paris.

     

    Mais tout cela prend fin avec la révolution russe. Dès 1917 Bakou est touchée par la guerre civile. Une fois aux mains des Rouges, un coup dans celles des Blancs, un temps indépendant, l'Azerbaïdjan fini par être rattaché à l'URSS. Les Nussimbaum fuient les violences en traversant la mer Caspienne vers l'Iran. Un long périple les mène ensuite à Constantinople puis à Berlin.

     

    En cours de route, Lev s'est converti à l'islam. Depuis sa jeunesse il est fasciné par la civilisation musulmane qu'il voit comme un lien avec ses racines orientales. A Berlin il s'inscrit aux Langues Orientales, se fait appeler Essad Bey et commence à écrire. C'est un auteur très prolixe qui écrit des biographies (de Nicolas 2, de Lénine, de Staline), des ouvrages sur la révolution russe ou le Caucase, une autobiographie romancée. C'est un auteur à succès de la fin des années 20 et du début des années 30. Mais en 1935 Lev est frappé par deux malheurs : sa femme le quitte et il est interdit de publication en Allemagne car juif. Il termine sa vie en Italie, un peu isolé, atteint par une maladie dégénérative dont il meurt en 1942.

     

    J'ai beaucoup apprécié ce passionnant ouvrage. Tom Reiss est un conteur habile qui sait mettre en valeur ses découvertes. Il a travaillé pendant cinq ans pour percer à jour les secrets de Lev. Il a eu des coups de chance, des rencontres inattendues qui lui ont permis d'avancer. Il est arrivé aussi juste au dernier bon moment car certains des témoins qu'il a rencontrés étaient des personnes très âgées qui sont mortes peu après. Cet aspect humain de sa recherche me fait penser au travail de Daniel Mendelsohn pour Les disparus.

     

    La vie de Lev est aussi un prétexte pour nous présenter les régions qu'il traverse et les gens qu'il rencontre. J'ai découvert ainsi l'histoire de l'Azerbaïdjan qui m'a beaucoup intéressée. Depuis longtemps je suis fascinée par le Caucase et son mélange de populations et de langues. L'auteur nous présente enfin son personnage comme le type même de l'orientaliste juif des 19° et 20° siècles, phénomène d'abord apparu dans l'Angleterre victorienne. Ces orientalistes juifs voyaient les Arabes comme des frères et il y eût des sionistes promusulmans. Tout cela est bien loin aujourd'hui.

     

    Et maintenant je vais lire Ali et Nino.

     

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