• la-riviere-noire.jpg

    Dans le centre ville de Reykjavik, un homme, Runolfur, est retrouvé égorgé à son domicile. Dans sa poche, des comprimés de Rohypnol, la drogue du viol. Sur place, des éléments qui laissent penser qu'une femme était présente dans l'appartement au moment des faits. Runolfur aurait-il été tué par une femme qu'il était en train de violer ?

     

    En l'absence du commissaire Erlendur, le héros habituel de cette série, c'est son adjointe Elinborg qui mène l'enquête. Je fais donc connaissance de façon plus approfondie avec ce personnage qui se passionne pour la cuisine indienne. On peut comprendre pourquoi quand elle évoque la cuisine islandaise de son enfance : "Le mercredi était le jour du poisson faisandé (...). Une bonne quantité de graisse de mouton ne suffisait pas à atténuer l'odeur de ce mets délicat que sa mère faisait bouillir jusqu'à embuer l'ensemble des vitres de la maison au point de boucher la vue."

     

    Elinborg est mère de trois enfants dont un ado boudeur qui lui adresse de moins en moins la parole et se confie sur internet ce dont elle soufre. J'aime ce contraste entre une vie somme toute tranquille avec ses soucis quotidiens et cette enquête qui amène notre héroïne à rencontrer des victimes de viol et qui fait remonter à la surface des agressions plus anciennes. Arnaldur Indridason montre bien tout le travail de fourmi et les tâtonnements qu'il y a derrière la découverte de la vérité mais si j'apprécie cette série c'est d'abord pour la présentation de l'Islande et de la vie quotidienne dans ce pays lointain.

     

    votre commentaire
  • hortenseetqueenie.jpg

    Le titre, la photo de couverture, j'ai cru qu'il s'agissait d'une histoire d'amitié entre Hortense et Queenie. Ca n'est absolument pas le cas mais néanmoins un très bon roman. En VO le titre est Small island. Rien à voir avec la traduction française, n'est-ce pas ?

     

    Alors, qu'est-ce que ça raconte ?

    Hortense et Gilbert Joseph, un couple de jeunes Jamaïcains, ont émigré à Londres en 1948. Pendant la guerre Gilbert s'est engagé dans la RAF, il a donc déjà vécu en Grande-Bretagne et subi le racisme. Pour Hortense, femme fière qui rêve depuis longtemps de vivre dans la Mère Patrie, le choc de la réalité est encore plus rude. Hortense et Gilbert louent une chambre chez Queenie dont le mari, Bernard, n'est pas revenu de la guerre.

     

    Le récit fait des aller-retour entre le présent (1948) et avant : la jeunesse d'Hortense à la Jamaïque, les années de Gilbert dans la RAF en Angleterre, les premiers temps du mariage de Queenie et les difficultés de Bernard en Inde pendant la guerre. Chaque personnage intervient pour présenter les événements selon son point de vue.

     

    Andrea Levy traite du racisme quotidien et de la confrontation des cultures avec beaucoup d'intelligence. Les sentiments sont finement analysés : l'incompréhension face à des habitudes différentes, la déception de découvrir une réalité si différente de ce qu'on avait imaginé et la difficulté d'accepter cette réalité. Hortense et Queenie sont aussi deux femmes qui se sont mariées par souci de fuir leur situation plutôt que par inclination pour leur conjoint. Les circonstances leur donnent l'occasion de prendre leur vie en main. J'ai beaucoup apprécié ce roman.

     

    L'avis de Gambadou

     

    1 commentaire
  • Henri Minczeles, Une histoire des Juifs de Pologne, La découverteLa lecture de cet intéressant ouvrage m'a appris des choses non seulement sur l'histoire des Juifs de Pologne mais aussi sur le judaïsme en général et enfin sur l'histoire de la Pologne.

     

    "Mille ans de vie juive sur cette terre et en cinq ans l'extermination nazie préparée activement par la majorité des Polonais ?" Rachel Ertel.

     

    Depuis le Moyen-âge jusqu'au début du 20° siècle la Pologne a été un lieu de repos pour les Juifs, protégés par la monarchie et la noblesse. En même temps les Polonais ont toujours été antisémites sous l'influence de l'Eglise catholique et il y avait à l'occasion des violences et des pogromes. Globalement cependant la communauté s'est développée jusqu'à former 10% de la population au début du 20° siècle. Comme ils étaient plus urbanisés que les chrétiens de nombreuses villes étaient majoritairement juives.

     

    Le saviez-vous ? Au 16° siècle le Grand duché de Lituanie était le pays le plus étendu d'Europe. Il comprenait alors la Pologne.

     

    Entre 1795 et 1918 la Pologne n'existe plus comme Etat indépendant. Elle est partagée entre les trois empires russe, allemand et austro-hongrois. Cette période est aussi celle d'un foisonnement d'idées nouvelles, religieuses ou laïques : hassidisme, nationalisme, socialisme, syndicalisme, sionisme.

     

    Le début du 20° siècle est encore une époque de persécutions antisémites. La première guerre mondiale sert de prétexte au commandement russe pour évacuer les populations juives des régions du front. Accusés d'être des espions ils sont victimes d'exactions. Ca m'a fait penser à ce que subissent les Arméniens à la même époque sauf qu'ici il n'y a pas une volonté systématique de tuer. La fin de la guerre marque aussi le retour à l'indépendance de la Pologne. Malgré les violences qui leurs sont faites l'entre-deux-guerres est un âge d'or culturel pour les Juifs de Pologne.

     

    En septembre 1939 la Pologne est vaincue en quatre semaines par les Allemands qui assassinent aussitôt l'élite du pays (52 000 victimes ?). En tout plus de deux millions de Polonais (non-juifs) ont été victimes de l'occupation. Pour les Juifs le bilan est d'environ trois millions de morts c'est-à-dire la quasi totalité du judaïsme polonais. Henri Minczeles présente les principaux ghettos et les étapes de la shoah, la résistance passive et active des Juifs (19 avril-16 mai 1943 : insurrection du ghetto de Varsovie).

     

    Varsovie se soulève du 1°août au 2 octobre 1944. Les troupes soviétiques massées sur la rive droite de la Vistule n'interviennent pas. La ville est rasée par les Allemands et sa population déportée. Ce n'est qu'à partir du 17 janvier 1945 que les Russes "libèrent" la capitale et y installent un gouvernement provisoire. Le pays est prêt à passer sous la domination du "Grand frère" ce qui ne va pas sans mal car la population résiste. Il y a des "gars de la forêt" qui luttent contre la prise en main de leur pays par les Soviétiques et massacrent des Juifs, considérés par eux comme des communistes. Cet épisode de l'histoire polonaise me fait penser à ce qui s'est passé en Estonie où il y eut aussi des anti-communistes cachés dans les bois, ce que j'ai appris dans Purge. Ce qui me manque c'est de savoir quel a été le comportement des Estoniens vis à vis des Juifs ce que Sofi Oksanen ne dit pas du tout.

     

    Pendant la période communiste la plupart des Juifs survivants qui y étaient revenus quittent la Pologne. Depuis une dizaine d'années certains Polonais semblent commencer à s'intéresser au passé juif de leur pays. En même temps l'antisémitisme reste présent alors qu'il n'y a pratiquement plus de Juifs en Pologne.

     

    Pour rédiger son histoire des Juifs de Pologne Henri Minczeles est parti de nombreuses sources. Quand elles ne disent pas la même chose il le signale et tranche d'une façon qui m'a semblé modérée. Son propos est de présenter une image de la situation ni misérabiliste ni enjolivée, ce que j'apprécie. Le résultat est tout à fait accessible et fort intéressant.

     

    1 commentaire
  • purge-s-o.jpg

    En Estonie, en 1992, au moment où le pays accède à l'indépendance. Une vieille femme, Aliide Truu, vit seule dans une ferme isolée. Elle est persécutée par des jeunes gens du village qui viennent jeter des pierres contre ses fenêtres la nuit. Un matin elle trouve dans sa cour une jeune femme mal en point. C'est Zara. Zara est en fuite, elle a échoué chez Aliide qui la recueille. Zara n'est pas là par hasard, ce qu'elle cache à Aliide. Et Aliide aussi a beaucoup de choses à cacher. Derrière les non-dits la vieille se reconnait dans les réactions de la jeune et décide de la protéger contre ceux qu'elle fuit.

    Cet excellent roman met l'accent sur deux moments de l'histoire de l'Estonie : la fin des années 40 quand le pays passe sous la domination soviétique et le début des années 90 quand il retrouve son indépendance. A travers l'histoire d'Aliide Truu Sofi Oksanen montre les ravages du stalinisme : les purges délirantes où on accuse le voisin de tout et n'importe quoi dans l'espoir de détourner l'attention de soi-même; les jalousies familiales qui se renforcent de la possibilité de nuire; les vies bâties sur des mensonges.

     

    La sortie du totalitarisme n'est pas une époque facile non plus. Les cadres de la société s'effondrent laissant les mafias prospérer. Les haines étouffées par des années de terreur peuvent enfin s'exprimer. Dans ces périodes où la loi du plus fort l'emporte les femmes sont souvent victimes. Aliide reconnait en Zara les réaction de quelqu'un qui s'est trouvé comme elle confronté à la violence brute. Elle comprend aussi que l'occasion lui est enfin donnée de racheter ses fautes passées.

     

    J'ai beaucoup aimé Purge pour son histoire poignante et parce qu'il m'a permis de découvrir l'histoire de l'Estonie (il y a une rapide chronologie à la fin) que je ne connaissais pas.

     

    L'avis d'Elfique, celui de Gambadou, et celui de Mélopée.

     

    votre commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires