• arton22243-51b69Jedwabne 1941, la mémoire d'un pogrom dans la Pologne d'aujourd'hui

     

    A Jedwabne, petite ville de l'est de la Pologne, le 10 juillet 1941, les habitants polonais ont rassemblé sur la place du marché leurs voisins juifs et les ont persécutés toute la journée. Le soir les survivants ont été enfermés dans une grange à laquelle le feu a été mis. Plusieurs centaines de personnes ont été assassinées ce jour-là. Dans les alentours des pogroms similaires ont eu lieu à la même époque. Les Allemands n'étaient pas présents sur place ou en nombre très limité.

     

    Après la guerre le pouvoir communiste a jugé quelques uns des meneurs. Ils ont été condamnés à de courtes peines ou acquittés. Petit à petit l'idée s'est imposée en Pologne que ce crime avait été organisé et encadré par les Allemands. A Jedwabne tout le monde connaissait la vérité mais la loi du silence régnait. Les assassins tenaient le haut du pavé, ceux qui avaient caché des Juifs rasaient les murs.

     

    En 2000 Jan Gross, écrivain américain d'origine polonaise, publie Les voisins. En s'appuyant sur le témoignage d'un des rares rescapés il assure que les coupables sont bien les habitants polonais de Jedwabne. En Pologne, l'ouvrage de Gross a un grand retentissement et déclenche la polémique. Anna Bikont, journaliste à Gazeta Wyborcza, part enquêter à Jedwabne et dans les environs où elle rencontre des acteurs du pogrom : rescapés, témoins, bourreaux. Elle s'interroge aussi sur la mémoire des événements : comment les habitants de Jedwabne vivent-ils aujourd'hui avec l'accusation qui frappe leur communauté ?

     

    Le résultat est un ouvrage passionnant qui alterne journal (il s'étale du 28 août 2000 au 30 juin 2003) où l'auteur relate ses rencontres à la recherche de la vérité et parties plus historiques. A Jedwabne le sentiment qui domine est un antisémitisme forcené qui me fait froid dans le dos et qui rend Anna Bikont physiquement malade. Elle-même est juive, information qui ne tarde pas à se répandre dans cette communauté obsédée par l'origine réelle ou supposée de ses interlocuteurs. Elle doit rendre visite en cachette à certains témoins pour qu'ils ne soient pas victimes de malveillances (coups de téléphone en pleine nuit). Heureusement elle rencontre aussi des personnes capables d'évoluer, ainsi le maire de la ville, finalement obligé de démissionner après avoir organisé une cérémonie commémorative du pogrom.

     

    Le crime et le silence est paru en Pologne en 2004 et vient seulement d'être traduit en français. Que s'est-il passé à Jedwabne depuis que l'affaire a éclaté il y a dix ans ? Une postface nous en informe : rien n'a changé, l'antisémitisme domine encore. La Pologne pendant ce temps a évolué. J'ai participé à un voyage d'étude dans ce pays fin août. J'ai rencontré des Polonais, artistes, enseignants qui travaillent au quotidien pour faire vivre la mémoire de la vie juive et de la shoah dans leur pays.

     

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    Vienne, 1903. Une chanteuse d'opéra à succès, Ida Rosenkrantz, est retrouvée morte dans sa chambre. Accident, suicide par excès de laudanum ? A l'autopsie la découverte d'une côte cassée laisse penser qu'elle aurait pu être assassinée. L'inspecteur Rheinhardt mène l'enquête dans les plus hautes sphères de la société viennoise que fréquentait Ida. Comme d'habitude Rheinhardt reçoit l'aide de son ami, le psychiatre Max Liebermann.

     

    En parallèle de cette enquête dans le présent Max Liebermann s'interroge aussi sur la mort prématurée, 40 ans plus tôt, du compositeur David Freimark. Là aussi l'accident apparent ne serait-il pas en fait un crime ? C'est la musique -plus ses talents professionnels- qui permettra au psychiatre de résoudre cette deuxième affaire que j'ai trouvée plus intéressante que la première.

    Enfin notre héros progresse dans sa relation avec miss Lydgate à partir du moment où celle-ci décide de prendre un peu les choses en main.

     

    J'ai retrouvé avec plaisir les personnages de cette série que j'apprécie et qui m'a procuré un bon moment de lecture. L'arrière-plan historique nous montre un empereur François-Joseph vieillissant, fragilisé par des scandales et par la montée de l'antisémite Lueger, bourgmestre de Vienne. Dans les confins de l'empire les minorités s'agitent et nos personnages s'en inquiètent tout en voulant croire que le pire ne viendra pas :

    "- Le bourgmestre, le palais et comme si ça ne suffisait pas, maintenant la Serbie !

    - La Serbie ?

    - Les assassinats ! Mon collègue Hohenwart pense qu'il va y avoir une guerre.

    - C'est  impossible. La Serbie n'est pas un pays assez important. Quelques escarmouches, peut-être..."

     

    La quatrième de couverture nous annonce que cet ouvrage est le dernier de la série. Pourtant à la lecture je ne trouve rien de définitif. Moi aussi je veux croire que cela ne sera pas.

     

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