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    Fabcaro, Moins qu'hier (plus que demain), GlénatCette dernière BD de Fabcaro traite de la difficulté de communiquer à l'intérieur du couple, de l'usure du temps, de l'ennui qui s'installe. L'ouvrage se présente sous forme de courtes saynètes : une planche = un couple = une histoire. Bien souvent ce sont les hommes qui ont le mauvais rôle : peu impliqués ou dans le déni, ils ont bien du mal à voir qu'une relation bat de l'aile.

     

     

    Je retrouve avec grand plaisir l'humour caustique et le non-sens qui m'ont déjà tant fait rire dans Zaï zaï zaï zaï. Si c'est si drôle c'est aussi que bien souvent ça touche juste.

     

     

    Fabcaro, Moins qu'hier (plus que demain), Glénat


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    Jean d'Aillon, Montségur, 1201, J'ai luDe retour de Londres, Guilhem d'Ussel est surpris de trouver, dans son fief de Lamaguère, Amicie de Villemur qui fut sa maîtresse mais qui le quitta pour faire un riche mariage. Aujourd'hui Amicie est veuve et s'est réfugiée auprès de celui qui l'aime encore pour échapper à son beau-frère qui veut la forcer à l'épouser pour mettre la main sur le château de Saverdun dont elle est maintenant seigneur.

     

     

    Peu avant Pâques, Guilhem et Amicie se rendent à Saint Gilles pour y négocier Saverdun avec le comte de Toulouse et Esclarmonde, soeur du comte de Foix. Guilhem y fait la connaissance de Wolfram d'Eschenbach, minnesinger allemand qui chante les aventures de Perceval à la recherche du graal et de l'émeraude qu'il contient. Cette quête et la croyance que l'objet miraculeux pourrait être caché près de Montségur, attire aussi le comte Dracul, ambassadeur de Transylvanie, un trio de moines cisterciens et enfin le cathare Enguerrand, suivi par sa fille Sanceline, elle aussi ancienne amante de Guilhem.

     

     

    L'histoire est un peu lente à démarrer, il faut près de la moitié du livre pour expliquer qui est qui et surtout quelles sont leurs relations car tout cela était bien complexe à l'époque, en tout cas pour quelqu'un du 21° siècle. Ensuite c'est parti pour l'action avec combats et trahisons, meurtrissures et punition des félons.

     

     

    J'aime bien cette série. Il me semble qu'elle dépeint plutôt bien la mentalité de l'époque. Cet épisode montre que des femmes pouvaient diriger une seigneurie. Ses vassaux viennent rendre hommage à Amicie. Ici j'apprécie aussi que l'action se déroule en majorité en Ariège, un département que je connais un peu pour y avoir passé mon adolescence.

     

    L'avis d'A Little Bit.

     


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    Leonardo Padura, Electre à la Havane, MétailiéOn découvre, dans le bois de la Havane, le corps d'un jeune homosexuel assassiné par strangulation. Au moment de sa mort Alexis Arayàn était vêtu d'une belle robe rouge, conçue en 1971 par le metteur en scène Alberto Marquès pour la pièce Electra Garrigó de Virgilio Piňera (laquelle mise en scène n'a jamais été jouée, Marquès ayant été envoyé en rééducation peu avant). Chassé de chez lui par son père, Alexis s'était réfugié chez Marquès, homosexuel également.

     

     

    Voilà Mario Conde obligé d'enquêter dans le milieu homosexuel de la Havane. Et cela lui pose un vrai problème car, il le reconnaît lui-même, il a des préjugés contre les homosexuels. Cependant, à force de fréquenter le Marquès, le Conde fini par apprécier en lui l'homme intelligent et cultivé, au point de lui faire lire une nouvelle qu'il a rédigée. Si l'homophobie affichée du héros me dérange, j'apprécie qu'il soit capable d'évoluer sur ce point. Par contre les choses restent très confuses dans sa tête : entre homosexuel, travesti et transgenre, il ne fait pas bien la différence.

     

     

    De plus, si Conde se pose des questions sur ce qu'il peut ressentir vis à vis des homosexuels, il n'a par contre aucun recul quant à son racisme et son sexisme. Voici ce qui lui vient à l'esprit alors qu'il mate une femme dans la rue :

    "... le pas prodigieux de cette femme non moins prodigieuse qui combinait brutalement tous les attraits : les très longs cheveux blonds, lourds et langoureux, retombaient sur des fesses chevauchables d'esclave affranchie, un cul au profil strictement africain, dont les rondeurs aux muscles bien dessinés redescendaient à travers deux cuisses compactes vers des chevilles d'animal sauvage. Le visage -le Conde était de plus en plus étonné- n'était pas inférieur à cette arrière-garde invincible : des lèvres de papaye mûre prenaient le dessus sur deux petits yeux asiatiques délurés, définitivement mauvais, avec lesquels, à la hauteur du théâtre où s'acheva la poursuite et la fouille optique, elle regarda un instant le Conde avec une arrogance orientale avant de le rejeter sans appel. La grande salope, elle sait qu'elle est drôlement bien foutue et elle y prend du plaisir. Elle est tellement bien foutue que moi je serais capable de la tuer..."

    Alors là, c'est la totale ! Rapide analyse : préjugés racistes : Noire = esclave = animal sauvage ; Asiatique = mauvaise = arrogance. Préjugés sexistes : femme = grande salope. Et cette scène de harcèlement de rue sans parole nous mène au féminicide.

    A la fin notre héros se demande, au sujet du meurtre sur lequel il enquête, "pourquoi il pouvait se passer dans le monde des événements aussi terribles". Eh, sans doute parce qu'il y en a d'autres qui ont les mêmes préjugés que toi mais que tous n'ont pas le cadre moral qui les empêche de passer à l'acte !

     

     

    Je dois dire que je supporte de moins en moins cette vision de l'homme blanc hétérosexuel comme norme de l'humanité qui m'a vraiment gênée ici alors que j'ai retrouvé aussi ce qui me plaît habituellement chez Leonardo Padura, la critique très claire du régime cubain et la belle écriture.

     


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    Yaa Gyasi, No home, Calmann LévyAu milieu du 18° siècle, en Gold Coast, aujourd'hui Ghana, naissent deux filles, Effia et Esi, de même mère mais de pères différents. Chacune ignore l'existence de l'autre. Effia est donnée en mariage à James Collins, le gouverneur britannique du fort de Cape Coast. Esi est capturée, vendue comme esclave et déportée vers les Etats-Unis au départ de ce même fort. Les deux soeurs vont donner naissance à deux lignées dont nous suivons l'histoire jusqu'à nos jours.

     

     

    En Afrique, les descendants d'Effia font partie de la classe dirigeante. Je découvre les guerres entre Ashantis et Fantis pour se procurer des esclaves mais aussi la résistance à la colonisation. A la fin du 20° siècle, face à la déception d'une indépendance qui n'a pas permis de réaliser les rêves d'une vraie autonomie, une partie de la classe éduquée s'expatrie vers les Etats-Unis.

    Aux Etats-Unis, les esclaves sont dans l'impossibilité de fonder des familles durables. Ils sont séparés par la mort ou la vente. Yaa Gyasi nous livre de ce fait de beaux portraits de femmes fortes. Après l'abolition de l'esclavage, d'autres moyens d'entraver l'émancipation des Noirs apparaissent. Les jeunes hommes sont jetés en prison au moindre prétexte puis loués à des entreprises pour lesquelles ils travaillent gratuitement -notamment comme mineurs dans des conditions très difficiles.

     

     

    La narration alterne les chapitres racontant l'histoire d'un personnage de la branche ghanéenne puis de la branche américaine. Tous les deux chapitres, on progresse d'une génération. Il y a un arbre généalogique au début pour pouvoir suivre et je m'y suis souvent référée car, pendant longtemps, j'ai trouvé que cette construction hachait le récit. Je reconnais cependant que mon rythme de lecture aussi a été haché du fait d'obligations professionnelles plutôt prenantes. Ceci explique peut-être cela car j'ai profité d'un week-end enfin disponible pour lire tous les derniers chapitres d'une traite et j'ai enfin été prise par ma lecture. Néanmoins 7 générations X 2 = 14 chapitres. C'est ambitieux et certains personnages auraient sans doute mérité qu'on s'attarde plus sur leur cas.

    Ce roman est une invitation à continuer la découverte de l'histoire des Africains dans le monde et une réponse claire à ceux qui pensent que la colonisation a pu apporter des bienfaits à ceux qui en ont été victimes.

     

     

    L'avis de Keisha, celui de Krol.


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    Philippe Besson, "Arrête avec tes mensonges", JulliardEn 1984, Philippe Besson a 17 ans et il est élève de terminale au lycée de Barbezieux en Charente-Maritime. Il y fait la connaissance de Thomas avec qui il vit sa première histoire d'amour. Un amour caché parce que Thomas ne veut pas que son homosexualité soit connue.

     

     

    "Arrête avec tes mensonges" disait souvent la mère de Philippe Besson à son fils. Il inventait en effet des histoires et les racontait tellement bien qu'elle ne savait pas si elle devait le croire ou pas. Dans ce roman en partie autobiographique, l'auteur nous assure qu'il a enfin décidé de lui obéir. Quoi qu'il en soit c'est un beau livre, bien écrit et touchant avec une fin poignante.

     

    Il y a une scène où Philippe et Thomas sont tous les deux invités à la même soirée d'anniversaire sans le savoir et font semblant de ne pas se connaître. Philippe Besson souffre : "Si on n'en parle pas, comment prouver que ça existe ? Un jour, quand l'histoire sera terminée, puisqu'elle se terminera, nul ne pourra témoigner qu'elle a eu lieu. L'un des protagonistes (lui) pourra aller jusqu'à la nier, s'il le souhaite, jusqu'à s'insurger qu'on puisse inventer pareilles sornettes".

    J'ai rêvé d'un monde où les garçons qui s'aiment -ou les filles- pourraient danser ensemble dans une soirée d'anniversaire sans que personne n'y fasse plus attention que ça.


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    Hannelore Cayre, Commis d'office, MétailiéChristophe Leibowitz-Berthier, le narrateur, est un avocat qui n'a pas fait la belle carrière qu'il pensait mériter. Il est abonné aux rôles de commis d'office pour petits délinquants. C'est pourquoi il est un peu étonné d'être recruté par Dalil Lakdar, collègue sans scrupules, prêt à tout pour faire libérer ses clients trafiquants de drogue et s'en mettre plein les poches au passage.

     

     

    Commis d'office est le premier roman de Hannelore Cayre. Il m'a semblé qu'elle avait écrit mieux depuis. Il y a déjà la critique des travers de la justice mais ici je trouve que c'est essentiellement grinçant et moins réjouissant que ce qu'elle a fait ensuite. J'ai retrouvé deux anecdotes qu'elles a reprises ensuite dans Comme au cinéma et j'ai trouvé cela un peu gênant. J'ai été intéressée cependant par ce que j'ai appris sur le sort des commis d'office et les magouilles de certains avocats.

     

    L'avis de Keisha.


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