• Immobilisé par un accident de voiture August Brill, un critique littéraire à la retraite, veuf depuis peu et pas encore bien remis de la mort de sa femme, est venu habiter chez sa fille Miriam le temps de sa convalescence. Miriam elle-même souffre encore de son divorce, cinq ans auparavant. Elle héberge aussi sa propre fille, Katya, laquelle se sent responsable de la mort de son ex-petit ami qui vient d'être assassiné en Irak.

    Dans cette maison des âmes en peine chacun cherche un moyen d'éviter de ressasser ses souvenirs difficiles. August s'invente, pendant ses insomnies, des histoires dans lesquelles le 11 septembre n'a pas eu lieu et où l'Amérique est en proie à la guerre civile. Miriam écrit la biographie d'une femme qui a complétement changé de vie à l'âge de 45 ans et Katya visionne des films qu'elle analyse ensuite avec son grand-père.
    "Et ce monde étrange continue de tourner."

    Dans ce roman plusieurs histoires se mélangent, la réalité des personnages et l'imagination d'August Brill laquelle se nourrit aussi de sa propre réalité. Il y a aussi l'histoire de la femme dont Miriam écrit la biographie et celles des héroïnes des films choisis par Katya. Paul Auster raconte bien les histoires et c'est plaisant à lire mais je ne suis pas sure que ça me laissera un souvenir impérissable.
     

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  • Urvashi Butalia est une féministe indienne. Elle a fondé une maison d'édition qui publie des livres écrits par des femmes et sur les femmes. Dans cet ouvrage elle étudie la Partition (la séparation de l'Inde et du Pakistan au moment de l'indépendance, en 1947) du point de vue de ceux que l'histoire a souvent oubliés, les femmes, les enfants et les intouchables. La façon dont la Partition a été organisée administrativement (armée, administration) est présentée et ses conséquences sur les populations étudiées illustrées par des témoignages recueillis par l'auteur.

    La Partition a provoqué le plus grand déplacement de population de l'histoire, environ 12 millions de personnes, hindous et sikhs quittant le Pakistan pour l'Inde, musulmans quittant l'Inde pour le Pakistan. On estime à un million le nombre de victimes à cause des massacres inter-religieux mais aussi de malnutrition ou de maladie.

    75 000 femmes auraient été enlevées et violées. Pour les rechercher les deux pays ont mis en place des équipes chargées de les ramener auprès de leurs familles. Il a fallu d'abord définir quelles femmes étaient concernées : toute femme qui, à partir de mars 1947, vit avec un homme de l'autre religion. Dans ce cas là on ne leur demande pas ce qu'elles souhaitent, elles sont ramenées dans leur pays alors que leurs familles n'acceptent pas toujours de les reprendre. Si elles ont eu des enfants, la situation se complique encore.

    Urvashi Butalia montre aussi que, contrairement à une idée répandue, les exactions n'ont pas tant été le fait d'inconnus des victimes mais plutôt de proches, de voisins, voire même de membres de leur famille. Pour les protéger de la conversion forcée, beaucoup de femmes et d'enfants sont tués par leur propre famille. Chez les sikhs ils sont considérés comme des martyrs. Aujourd'hui ces histoires sont encore citées en exemple et les exécuteurs respectés.

    A travers tous ces exemples, l'auteure mène aussi une réflexion sur la mémoire de la Partition en Inde. Elle a jusqu'à présent été peu entretenue et au moment où Urvashi Butalia mène ses entretiens on lui demande souvent pourquoi elle le fait et quel intérêt ça présente. Elle-même ne s'est vraiment intéressée à la question qu'après l'assassinat d'Indira Gandhi en 1984 qui a provoqué des pogroms anti-sikhs (elle est à moitié sikhe) qui ont fait remonter chez beaucoup des souvenirs de la Partition.

    J'ai trouvé tout cela passionnant et intelligemment mené. Les traumatismes de la Partition sont régulièrement évoqués dans les romans qui se déroulent dans l'Inde contemporaine, j'ai donc apprécié d'en apprendre plus sur le sujet.
     

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  • En 1956, Mr Stevens, un majordome vieillissant qui a passé 35 ans de sa vie au service d'un lord Darlington, part une semaine en voyage à la rencontre d'une ancienne collègue, miss Kenton. Ce temps de vacances est l'occasion pour lui de se remémorer sa carrière et ses relations avec Miss Kenton et de se livrer à une introspection au sujet de sa conception profonde du métier et, partant,  du sens qu'il a donné à sa vie. Les vestiges du jour est présenté sous la forme du journal tenu par Stevens pendant ce voyage.

    Le sujet du roman est l'étude psychologique du personnage. Stevens est de nature compassé, handicapé des relations humaines et sa fonction est aussi un refuge pour lui. Il se protège en jouant son rôle très codifié. Quelques années avant le début du récit Darlington Hall a été racheté par un riche Américain qui semble attendre de son employé un peu de spontanéité, ce qui déconcerte fort ce dernier. Sa semaine de vacances lui ouvre un espace de liberté inhabituel, l'amène à discuter avec des inconnus et, petit à petit, à reconsidérer certaines de ses positions.

    Dans ses relations, et même avec ses proches (son père, Miss Kenton), le narrateur se montre également incapable d'exprimer ses sentiments. Ainsi quand il décrit ce qu'il voit ou fait, il utilise le "je" mais dès lors qu'il pourrait être impliqué de façon plus personnelle, il passe au "on" : "Je discernais à travers la brume un clocher entouré d'un amas de toits d'ardoise sombre; ça et là, des volutes de fumée blanche montaient des cheminées. On est forcé d'avouer qu'à ce moment-là, on s'est senti submergé par un certain sentiment de découragement."
    Cette incapacité l'empêche même souvent de prendre conscience qu'il ressent certaines choses.

    Pour toutes ces raisons Stevens s'est totalement investi dans son métier au point d'avoir vécu par procuration à travers son maître. Celui-ci, manipulé par l'extrême-droite, a tenté de jouer un rôle dans les relations entre l'Allemagne nazie et la Grande-Bretagne avant la seconde guerre mondiale et Stevens, incapable de recul critique, est persuadé qu'en servant lord Darlington il a servi son pays. Son voyage qui est aussi un cheminement intérieur l'amène à la révélation finale qu'en vivant pour et par les autres il n'a pas vécu lui-même.

    Tout ça n'est pas très gai mais tellement bien mené par Kazuo Ishiguro qui excelle à décrire le fonctionnement de Stevens et qui montre ainsi tout ce que l'on perd quand on se contrôle trop. J'ai beaucoup aimé cette lecture.
    Mon édition est plus ancienne, la couverture est différente.
     

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  • Un don est l'histoire de l'esclave Florens, séparée de sa mère à l'âge de huit ans, à la fin du 17° siècle, pour être donnée à un fermier en paiement d'une dette. Le roman alterne des passages qui sont des épisodes de la vie de Florens, racontés par elle-même, et l'histoire d'un certain nombre de personnages qui interviennent dans la vie de Florens, par un narrateur extérieur.

    On rencontre les maîtres de Florens, Sir et Mistress, Jacob et Rebekka Vaark. Ce sont des libre-penseurs qui espèrent mener leur vie en indépendants, sans trop de relations avec la communauté anabaptiste voisine. A la ferme il y a aussi Lina, une esclave indigène; Sorrow, une fille trouvée un peu bizarre et occasionnellement Willard et Scully, deux travailleurs loués. Les travailleurs loués sont des esclaves blancs. Ils sont engagés, parfois tout jeunes, pour payer une dette -ou celle de leurs parents- ou en punition d'un délit quelconque. Leur peine a en théorie une durée déterminée mais est généralement prolongée pour une raison ou une autre.

    J'ai trouvé intéressant de découvrir cette société américaine à une époque où le pays était encore peu peuplé, où il y avait encore des Indiens (des indigènes) en liberté. Toni Morrison montre les méfaits de la superstition de sectes venues là pour trouver la liberté religieuse et qui imposent leurs croyances aux plus faibles. Le thème principal reste le traumatisme pour Florens de la séparation d'avec sa mère. Je n'ai compris le sens véritable du titre qu'à la toute dernière page et ce fut un coup au coeur. Cette révélation teinte toute l'histoire de Florens d'un caractère encore plus tragique.

    Toni Morrison est une de mes auteurs favoris et j'ai lu pratiquement tous ses livres. Elle m'a conquise avec Beloved. A l'époque je m'intéressais un peu à la question de l'esclavage aux Etats-Unis et j'avais lu plusieurs biographies ou récits d'anciens esclaves, livres de témoignages mais c'est avec Beloved, un roman, que j'ai eu le sentiment de comprendre vraiment ce que signifiait l'esclavage. Il me semble depuis que si la notion de péché, ou de Mal, a un sens, c'est ici une des situations où elle peut s'appliquer. Le critique du New York Times, repris en quatrième de couverture, compare Un don à Beloved. J'ai le souvenir que ce roman m'avait fait une impression plus forte que je retrouve à la dernière page de Un don.

     

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  • Vikram Lall, le héros et narrateur de ce roman, est un Indien du Kenya. Son grand-père y a immigré pour travailler à la construction de la voie de chemin de fer qui traverse le pays. Agé de 50 ans environ, réfugié au Canada, il se remémore les épisodes de sa vie, tachant d'expliquer ce qui a fait de lui "l'homme le plus corrompu d'Afrique".

    Le point de départ est en 1953. Vikram, alors âgé de huit ans, et sa soeur Deepa étaient amis avec un jeune Africain, Njoroge et des enfants de colons anglais, Bill et Annie. Ils jouaient souvent ensemble. Deepa était amoureuse de Njoroge et Vikram d'Annie. Mais un jour Bill, Annie et leurs parents sont massacrés par la guérilla Mau-Mau qui lutte pour l'indépendance du Kenya. Ce drame traumatise profondément Vikram et va marquer tout le reste de sa vie.

    J'ai beaucoup aimé cet excellent roman. Malgré sa carrière d'intermédiaire de la corruption Vikram Lall est un personnage sympathique du fait de sa capacité à analyser son comportement et à reconnaître sa responsabilité. Les mécanismes de la corruption, la façon dont hommes politiques et fonctionnaires ont profité des largesses distribuées par leurs alliés de l'est ou de l'ouest dans le cadre de la guerre froide est bien montré.

    J'ai trouvé passionnant aussi de découvrir l'histoire récente du Kenya. Il y avait dans ce pays une importante communauté indienne (dont est issu l'auteur). Ils ont d'abord été favorisés par le colonisateur par rapport aux Africains puis discriminés après l'indépendance. Ils occupaient souvent des emplois de commerçants prospères et ont été considérés (et traités) comme les Juifs de l'Afrique de l'est.

    MG Vassanji fait un parallèle entre l'entrée de Vikram Lall dans la vie adulte et l'accession à l'indépendance de son pays. Alors tout semble possible : le Kenya est un pays neuf où une nouvelle société va naître, sans discriminations. Avec l'âge viennent les désillusions. Les promesses n'ont pas été tenues. C'est toujours une minorité qui détient pouvoir et richesse. Elle a changé mais elle utilise parfois les mêmes hommes de main que la précédente. Pourquoi ne pas prendre sa part ?

    Tout cela est très bien mené.
     

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  • En 1946 la Grande-Bretagne ne s'est pas encore remise des dégâts liés à la guerre. Il y a les tas de gravats des immeubles détruits de Londres, des personnes disparues dont on espère encore des nouvelles. Juliet Ashton est une jeune écrivain qui a acquis une certaine notoriété en écrivant des chroniques humoristiques sur la vie quotidienne pendant la guerre. Elle reçoit une lettre d'un fermier de l'île de Guernesey, Dawsey Adams, qui s'adresse à elle un peu par hasard. Il est à la recherche d'un livre et espère qu'elle pourra l'aider à se le procurer.

    Dawsey fait partie du Cercle des amateurs de littérature et de tourte aux épluchures de patates de Guernesey. Rapidement une correspondance se met en place entre Juliet, Dawsey et les autres membres du Cercle. Ils lui racontent leur goût pour la littérature et leur vie à Guernesey sous l'occupation allemande. Dès 1940 l'île a été quasiment coupée du monde jusqu'à la fin de la guerre, transformée en véritable camp retranché, soumise à un couvre-feu rigoureux. Puis Juliet se rend à Guernesey et y fait connaissance avec des personnages souvent excentriques et éminemment sympathiques.

    Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates est un délicieux roman par lettres que j'ai dévoré en une journée. Il y a des considérations sur ce que la littérature peut apporter dans des circonstances très diverses (quand votre pays est envahi, si vous voulez séduire une femme...), une présentation des conditions de vie à Guernesey pendant la guerre (c'est ce qui est le plus intéressant, à mon avis) et une charmante romance. On y croise une brochette de personnages pittoresques et larges d'esprit : ils accueillent sans porter de jugement l'homosexuel comme la "fille de Boche". Cet aspect est très plaisant mais, je pense, peu réaliste et vaguement anachronique.

    Ce livre a été très lu et apprécié sur beaucoup de blogs. Je l'ai vu chez Charlie Bobine et Papillon qui donne aussi plein de liens. La critique avec laquelle je suis le plus d'accord est celle d'Isil. Pour moi, la conséquence immédiate de cette lecture est l'abandon de celle de La maharani par Gita Mehta, au Livre de poche et que je me trainais depuis trois semaines. Comme le dit l'un des membres du Cercle : "Lire de bons livres vous empêche d'apprécier les mauvais".
     

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  • Ida Grinspan est née en 1929 en France de parents juifs polonais. Elle grandit à Paris. En 1940 elle est mise en pension dans un village du sud Deux-Sèvres, près de Melle. C'est là qu'elle est arrêtée en 1944 par des gendarmes français et déportée vers Auschwitz. Bien qu'elle n'ait que 14 ans elle est sélectionnée pour entrer dans le camp où elle passe deux hivers, affectée à divers kommandos. Elle est finalement évacuée vers Ravensbrück puis libérée.

    Dans ce livre rédigé à partir d'entretiens avec Bertrand Poirot-Delpech, Ida Grinspan raconte aussi, après son arrestation et la difficile survie à Auschwitz, les conditions de son retour à une vie ordinaire. Ses parents, déportés chacun de leur côté, ne sont pas revenus ; elle était une bonne élève mais se retrouve à 16 ans avec un certificat d'études pour tout diplôme et enfin peu de personnes sont prêtes à entendre le récit des souffrances des survivants. En 1988 elle retourne pour la première fois à Auschwitz, accompagnant une classe de lycéens. Depuis elle n'a pas cessé de témoigner, de rencontrer des jeunes pour que ceux qui ne sont pas revenus ne soient pas oubliés.

    Je connaissais déjà Ida Grinspan pour l'avoir vu dans le film "Les survivants" de Patrick Rotman (un excellent documentaire). Elle m'avait impressionnée par son entrain malgré ce qu'elle avait vécu. Le livre permet d'approfondir son histoire. Elle insiste particulièrement sur l'importance qu'il y avait à garder un peu de dignité dans le camp, à ne pas se laisser-aller : essayer de se laver de temps en temps, se procurer une cuillère pour ne pas avoir à laper sa soupe. La camaraderie avec d'autres adolescentes un peu plus âgées qu'elle a aussi été un soutien. Elles ont été solidaires et, après la guerre, celles qui sont revenues sont restées fortement liées.

    Voilà un ouvrage clair et facile d'accès. Destiné aux jeunes à partir de 15 ans il présente les principaux aspects de la déportation des Juifs de France.
     

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  • Un quartier ethnique au métro La Chapelle

    A Paris, près de la gare du Nord, dans le dixième arrondissement, se situe le "quartier indien" qui est en fait un quartier tamoul. C'est là que je viens acheter mes DVD de Bollywood quand l'occasion se présente d'un séjour dans la capitale.

    A Paris les Tamouls sont pour la plupart originaires du Sri Lanka. Ils ont fui la guerre et les exactions et se sont retrouvés en France depuis les années 80, un peu par défaut car à l'époque la Grande-Bretagne de Margaret Thatcher leur fermait ses portes. Ils habitent généralement en banlieue parisienne et le quartier de La Chapelle est le lieu où la communauté se retrouve, où ils ont leurs commerces, leurs temples, les cours du soir pour les enfants.

    J'ai été plutôt déçue par ce petit livre. J'ai trouvé l'étude superficielle. Il s'agit de parler de ce qu'on voit, de ce qui est apparent du quartier mais pas beaucoup de ce qu'il y a derrière. C'est à dire que c'est bien le territoire tamoul qui est le sujet, pas les Tamouls (c'était le titre du livre, il n'y a pas eu tromperie sur la marchandise). L'auteur a fait un travail de documentation, les citations s'enchaînent les unes après les autres mais il me semble qu'il manque une étude de terrain plus poussée.

     

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  • 2009 qui marque le centenaire de la mort d'Henry Russell est l'occasion de sortir cette biographie de celui qui fut un des premiers pyrénéistes. Monique Dollin du Fresnel est l'arrière-petite-nièce de Henry Russell ce qui lui a donné accès à des documents et surtout à la mémoire familiale. Elle présente de façon détaillée ce personnage que je ne connaissais pas.

    Henry Russell est né à Toulouse d'une mère française et d'un père irlandais. Thomas-John Russell-Killough avait quitté son Irlande natale où la noblesse catholique était discriminée. La famille déménage fréquemment : Pau, Bagnères de Bigorre (d'où madame emmène ses enfants en excursion dans les Pyrénées), Dublin. Henry poursuit ses études dans des pensionnats de garçons, d'abord en France puis en Irlande. Il mène une vie de jeune mondain, il n'est jamais question d'apprendre un métier. Les parents Russell ne voient qu'un avenir pour leurs fils : épouser une femme bien dotée qui leur permettra de vivre sans travailler, à l'image de ce qu'a fait le père. Cependant, Henry ne se mariera jamais. Vers l'âge de 30 ans il tombe amoureux d'une jeune Anglaise, fille d'un pasteur anglican mais renonce à l'épouser sous la pression de ses parents car elle n'est pas assez riche et elle n'est pas catholique. La peinture de cette société de rentiers dont font partie les Russell, de cette noblesse sur laquelle la Révolution française a passé sans laisser de traces apparentes  est une des choses qui m'ont le plus intéressée.

    Dès ses 20 ans, Henry est pris de l'envie de voyager. Il part pour l'Amérique puis pour l'Asie en traversant la Russie et pour l'Australie, mais il revient toujours vers les Pyrénées. Il va finalement organiser sa vie entre Pau où il passe l'hiver et les sommets des Pyrénées (principalement dans les Hautes-Pyrénées) en été. Chaque année il repart à l'assaut des cimes et il est l'auteur de très nombreuses premières. Tout était encore à faire à cette époque. Il s'était fait confectionner un sac de couchage en peau d'agneau et il aimait à l'occasion passer la nuit au sommet de ses chères montagnes, ce qui le faisait considérer comme un original.

    En 1880 il couche ainsi au sommet du Vignemale. Cet événement fondateur le lie définitivement au lieu. Il veut pouvoir y rester de façon plus confortable et se fait pour cela percer des grottes artificielles au col du Cerbillonas (3205 m) puis plus bas, à 2400m. Dans ses grottes Russell reçoit ses amis montagnards. Il leur offre bonne chère et bon vin. On boit sec à ces altitudes, ça réchauffe. Voilà une chose qui m'a stupéfaite : qu'on puisse faire monter à 3000 mètres, ouvriers du bâtiment, barres à mine et dynamite; qu'on creuse la montagne et que personne n'y trouve rien à redire. Autres temps, autres moeurs. Russell a même obtenu du préfet la concession des sommets du Vignemale pour 99 ans. Il voulait s'en sentir propriétaire...

    A partir de 1906 la santé d'Henry Russell commence à se dégrader. Il se remet d'abord difficilement d'une grippe puis un cancer du foie est diagnostiqué en 1908. Il meurt en février 1909. Il était monté à ses grottes pour la dernière fois en août 1906. (Je me demande ce qu'elles sont devenues aujourd'hui).

    J'ai trouvé très intéressante cette histoire d'un amoureux des Pyrénées, personnage d'un autre temps aussi. Au 19° siècle la découverte des montagnes est encore réservée à une minorité de privilégiés qui peuvent s'y payer des séjours. Les premiers arrivés laissent au sommet leurs noms dans une bouteille pour signaler leur performance aux suivants. A côté d'Henry Russell j'ai également découvert les guides de montagne, personnages de première importance, parfois négligés (mais pas par Russell). En voilà qui ont fait nombre de premières.
    L'ouvrage se lit facilement. Il est illustré de nombreuses photos dont beaucoup proviennent du musée des Pyrénées à Lourdes. Ca m'a donné bien envie de le visiter, ce que je ferai dès que possible, sans doute prochainement.


     

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  • Dans ce quatrième épisode de ses aventures nous retrouvons Shan, ancien inspecteur à Pékin qui, après être passé par le laogaï (le goulag chinois) et en avoir été officieusement libéré, vit maintenant dans un monastère bouddhiste secret, au Tibet. Au début de l'histoire, il s'apprête à partir pour une retraite dans une grotte quand ses projets sont contrecarrés par un incident qui survient lors d'une cérémonie dans un ancien monastère, détruit il y a 50 ans par l'armée chinoise. Un meurtre a été commis. On ne retrouve pas de cadavre mais une grande quantité de sang et le moine Liya, persuadé d'en être responsable, est profondément traumatisé.

    Apparaissent alors des Chinois venus de Pékin. Ming, directeur d'un grand musée et l'inspecteur Yao. Ils sont suivis de MCDowell, une Anglaise qui oeuvre pour le bien-être des enfants tibétains, et de l'agent du FBI Corbett. Que cherche tout ce monde à Lhadrung ? Il y aurait un trésor fabuleux, caché dans un ancien monastère et qui suscite bien des convoitises. Il est question de trafic et de vol d'oeuvres d'art et aussi de corruption, d'un cadre du parti qui n'est pas seulement habité par le désintéressement communiste.

    J'ai bien aimé ce roman. Les péripéties sont nombreuses, pas toujours évidentes à suivre mais l'ensemble est agréable. La simplicité des Tibétains, leur vie empreinte de religiosité, s'opposent au matérialisme brutal ou avide des autorités chinoise ou d'un collectionneur américain. Cependant la conviction des lamas pousse certains de leurs adversaires à s'interroger sur le sens de leur vie. Le cinquième volume de la série vient de paraître, je pense que je le lirai sous peu.
     

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