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Anne-Marie Garat, Dans la main du diable, Babel
Anne-Marie Garat est morte le 26 juillet 2022. Elle était née à Bordeaux en 1946 de parents ouvriers. Elle était passionnée par le cinéma et la photographie, deux arts dont il est question dans le roman que j'ai lu, encore à leurs débuts à l'époque dont il est question mais traités de façon fort intéressante.
Dans la main du diable. Orpheline toute petite, Gabrielle Demachy a été élevée par sa tante Agota Kertész, une immigrée hongroise. Elle est tombée amoureuse de son cousin Endre. Nous sommes à Paris en 1913 et Endre n'a plus donné de nouvelles à ses proches depuis son départ en Asie comme ingénieur chimiste en 1908. Convoquées au ministère de la guerre Agota et Gabrielle apprennent la mort d'Endre en Birmanie cinq ans plus tôt. Après le choc de la nouvelle, Gabrielle veut comprendre ce qu'il est arrivé à celui qu'elle considère comme son fiancé. Sur les conseils de Michel Terrier, employé du ministère, elle se fait engager comme institutrice de Millie, quatre ans, dans la famille Bertin-Galay, industriels du biscuit. Le docteur Pierre Galay, père de Millie, aurait en effet croisé Endre en Birmanie et Gabrielle espère apprendre auprès de lui les circonstances de la mort de son cousin.
C'est un véritable roman-feuilleton cette histoire, avec des rebondissements rocambolesques dont Anne-Marie Garat sème des indices ce qui fait que le lecteur a souvent un pas d'avance sur Gabrielle dans son enquête. Elle va devoir démasquer les mauvais coups d'un méchant particulièrement pervers qui me semble un proto fasciste.
Ce que j'ai apprécié en plus de ces aventures c'est le cadre historique et social de l'année 1913-1914 : il est question de la guerre des Balkans (1912-1913), de la crise coloniale au Sahara et au Maroc, de la semaine rouge, semaine d'insurrection populaire en Italie en 1914. Avec en plus des clins d'oeil au lecteur qui sait lui que tout cela va déboucher sur la Première Guerre Mondiale. Son enquête amène Gabrielle à vivre dans l'intimité d'une famille de la grande bourgeoisie industrielle mais aussi à fréquenter un jeune anarchiste qui lui fait découvrir les quartiers populaires les plus misérables.
Tout ceci est de plus fort bien écrit, l'analyse des motivations et des sentiments des personnages est approfondie et pertinente.
Enfin il y a des personnages très sympathiques et au destin desquels je me suis attachée, notamment des femmes fortes, indépendantes ou en recherche de liberté. Je pense à Gabrielle mais aussi à sa grande amie Dora, à Mme Mathilde, la patronne à poigne de la biscuiterie Bertin-Galay mais aussi à Sophie, épouse bafouée qui s'émancipe de façon plutôt réjouissante.
Pour toutes ces raisons c'est un roman que j'ai extrêmement apprécié, premier tome d'une trilogie dont je lirai sans doute la suite mais pas tout de suite car ce premier épisode compte 1288 pages et les deux suivants chacun près de 1000. Cette lecture est donc ma seconde participation au défi pavé de l'été de Brize.
Tags : Disparition, Roman, Femmes, Histoire, Défi/Lecture commune
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Commentaires
Anne-Marie Garat était venue à Budapest il y a quelques années mais je ne m'étais pas du tout aperçu qu'elle avait ce petit lien avec la Hongrie. En tout cas, Hongrie ou pas, ce livre m'intéresse pour son contexte. Mais je vois que se lancer dans sa lecture représente un gros investissement!
(huit images de lampadaires/voitures/vélo à cliquer pour pouvoir laisser ce petit commentaire!)
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Mardi 20 Septembre 2022 à 05:55
La langue hongroise joue un rôle dans l'intrigue. Désolée pour ce que tu me signales en fin de message...
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Un pavé qui m'a toujours un peu effrayée, mais tu en es venue à bout (bravo !) et tu as aimé ... donc ça vaudra peut-être le coup que je m'intéresse à lui de plus près (l'été prochain ^^ !).
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Mercredi 21 Septembre 2022 à 17:17
C'était le seul roman d'Anne -Marie Garat que j'avais sous la main et finalement je l'ai lu plutôt facilement.
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Bravo pour la lecture de ce pavé ! J'ai tenté de le lire il y a quelques années, et j'ai jeté l'éponge, le trouvant trop alambiqué..
Pour être du pavé c'est du pavé ! Je me suis fixé des objectifs en nombre de pages au début mais ensuite plus j'avançais, plus j'étais prise.