• Olivier Rolin, Le météorologue, Seuil-Paulsen

     

    Olivier Rolin, Le météorologue, Seuil-PaulsenAlexeï Féodossiévitch Vangengheim fut en 1929 le premier directeur du service hydro-météorologique d'URSS. En 1934 il est arrêté comme saboteur et condamné à l'internement au goulag. Il est détenu aux îles Solovki. Pendant sa détention il écrit régulièrement à sa femme et envoie à sa fille des dessins, devinettes ou petites leçons illustrées. C'est la découverte de cette correspondance qui a incité Olivier Rolin à enquêter sur Alexeï Féodossiévitch Vangengheim.

     

    Je découvre donc un personnage qui est un bon soviétique à tel point qu'il reste persuadé tout du long que son incarcération est une erreur. Il écrit à plusieurs reprises à Staline, convaincu que quand ce dernier aura connaissance de son cas il lui rendra justice. Ce comportement navre un peu l'auteur :

    "Il n'est pas admirable et c'est peut-être ça qui est intéressant, c'est un type moyen, un communiste qui ne se pose pas de question, ou plutôt qui est obligé de commencer à s'en poser à présent, mais il a fallu qu'on lui fasse une violence extraordinaire, pour qu'il en vienne là, timidement. C'est un innocent moyen. Dreyfus aussi était décevant, paraît-il, d'une autre façon. "Parce qu'il a été condamné injustement, disait de lui Bernard Lazare (cité par Péguy), on lui demande tout, il faudrait qu'il ait toutes les vertus. Il est innocent, c'est déjà beaucoup."

     

    Olivier Rolin, Le météorologue, Seuil-PaulsenVangengheim, lui, affecté au jardinage, organise les pierres sur ses plates-bandes pour dessiner des slogans à la gloire du communisme. Il s'occupe aussi à réaliser des mosaïques dont un petit portrait de Staline qu'il envoie à sa femme.

     

    Le deuxième personnage que je découvre c'est Olivier Rolin. Je n'avais encore jamais rien lu de lui. Je comprends qu'il a cru à l'utopie communiste et qu'il en est revenu. Il est donc très sévère pour les crimes de Staline.

    "L'histoire du météorologue, celle de tous les innocents exécutés au fond d'une fosse, sont une part de notre histoire dans la mesure où ce qui est massacré avec eux c'est une espérance que nous (nos parents, ceux qui nous ont précédés) avons partagée, une utopie dont nous avons cru, un moment au moins qu'elle "était en passe de devenir réalité". Et l'ignominie est si grande qu'elle est massacrée sans retour."

     

    J'apprécie vraiment qu'il dise clairement ce qu'a été concrètement la Grande Terreur. L'ignominie ce sont des gens nus, entravés, abattus d'une balle dans la nuque dans une fosse commune. Les nazis ne se sont pas comportés différemment. Mais eux ils n'avaient pas promis à l'humanité un avenir radieux. J'ai aimé cet ouvrage qui est à la fois un livre d'histoire et une réflexion sur les retombées de cette histoire.

     

    "On se prend à se demander ce qui se serait passé si la folie de Staline, décapitant toutes les élites du pays, scientifiques, techniques, intellectuelles, artistiques, militaires, décimant la paysannerie et jusqu'à ce prolétariat au nom de quoi tout se faisait, dont l'URSS était supposée être la patrie, n'avait pas substitué, comme ressort de la vie soviétique, la terreur à l'enthousiasme. L'introuvable "socialisme" que les "héros" s'imaginaient construire, et ceux aussi, comme Alexeï Féodossiévitch Vangengheim, qui n'étaient pas des héros, seulement d'honnêtes citoyens soviétiques, aimant leur travail, pensant servir le peuple en le faisant avec compétence, peut-être aurait-il existé ? Peut-être se serait-il avéré un système infiniment préférable au capitalisme ? Peut-être le monde entier, à part quelques pays arriérés, serait-il devenu socialiste ?"

     

    L'auteur s'est notamment appuyé sur Goulag de Anne Appelbaum et Voyage au pays des ze-ka de Julius Margolin.

    L'avis de Papillon.


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  • Commentaires

    1
    Henri
    Vendredi 26 Décembre 2014 à 17:03

    C'est bien pour cela que comprendre les raisons de l'arrivée au pouvoir de ce fou sanguinaire de Staline est si important à mes yeux. D'autant que l'histoire s'est répétée en Chine (Mao), et dans tous les Etats marxistes-léninistes. En cause, à la fois la théorie de l'avant-garde éclairée et l'usage de la violence comme arme politique. C'est ma conclusion pour le moment.

    2
    Lundi 29 Décembre 2014 à 10:25
    keisha

    Le lien fonctionne, j'arrive bien chez toi!

    3
    Lundi 29 Décembre 2014 à 18:43

    Parfait !

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