• Aharon Appelfeld, Et la fureur ne s'est pas encore tue, Editions de l'Olivier

     

    Aharon Appelfeld, Et la fureur ne s'est pas encore tue, Editions de l'OlivierBruno Brumhart, le narrateur, a vécu une enfance heureuse auprès de parents aimants, Juifs laïques et actifs militants communistes. Bruno est manchot. Il a perdu tout petit sa main droite dans des circonstances dont il a tout oublié et que ses parents ne veulent pas lui raconter. A l'école il est moqué pour son handicap. Son seul ami est frère Peter, instructeur religieux, ami des Juifs. Bruno exerce sa force et apprend à se défendre mais il est aussi un garçon rêveur. La nuit son moignon lui parle et est pour lui un moyen de communication avec les personnes qu'il aime et dont il est séparé. Ca donne un aspect un peu fantastique ou onirique au récit. Quand la guerre éclate Bruno, adolescent, et sa mère sont enfermés au ghetto puis Bruno est envoyé dans un camp dont il s'évade lors d'une révolte des prisonniers. Avec trois autres évadés il survit alors dans la forêt jusqu'à la fin de la guerre.

     

     

    Après la guerre Bruno se lance dans les affaires. Dans quel secteur ? Ca n'est pas dit clairement. Il y a plusieurs aspects qui restent un peu flous dans ce récit. Il est question de marché noir mais aussi de traque de criminels nazis et d'hébergement de réfugiés. Ses employés sont des survivants comme lui. Il s'installe dans le sud de l'Italie où il ouvre un lieu d'accueil pour rescapés de la shoah. Contrairement à ceux qui pensent que ces personnes doivent maintenant revenir à une vie normale, lui croit au contraire que pour retrouver le goût de vivre ils ont besoin d'un cadre extraordinaire. Il organise des concerts de musique classique et des lectures de la Bible. Il obtient effectivement des succès mais certains l'accusent aussi de ne penser qu'à son propre profit. La question est donc comment vivre après la shoah ? C'est celle qui se pose aussi à Bruno qui veut se montrer digne de ses parents disparus. Il est soutenu en cela par les relations qu'il a nouées avec ses camarades de déportation : "Sachez une chose, vous qui me lisez : nous sommes un seul et même groupe, nous possédons notre propre vocabulaire et nous sommes proches les uns des autres même à des milliers de kilomètres".

     

     

    L'écriture d'Aharon Appelfeld est sobre et efficace (et traduite par Valérie Zenatti) avec des accents et images poétiques. Il m'a fallu un peu de temps pour entrer dedans mais ensuite c'est bien plaisant. J'ai apprécié de retrouver dans cette lecture des choses pointées dans Dans le faisceau des vivants : l'attention portée au sens et à la force des mots. Pour cela c'était bien de lire ce roman en suivant.

     

    "Il n'est pas facile de quitter un lieu, même si l'on n'y vit que depuis quelques années. J'avais eu le temps de prendre racines, d'apprendre l'inclinaison des rayons du soleil et les teintes de la mer, j'avais trouvé les endroits d'où je pouvais capter les voix de mes amis sur le continent et au-delà des mers. J'avais construit des abris et il faudrait en construire d'autres".


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