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Jón Kalman Stefánsson, Lumière d'été, puis vient la nuit, Grasset
"Il y a si peu d'espace de la vie à la mort, de l'été à l'hiver."
Dans un petit village des fjords de l'ouest les habitants mènent une vie en apparence tranquille. Ils sont cependant, comme tout le monde, à la recherche du bonheur et agité par les passions humaines. Le directeur de l'atelier de tricot, un jeune homme "tellement élégant que cela confinait à de l'irrévérence" s'est soudain pris d'une telle passion pour l'observation des astres qu'il a abandonné son emploi et que sa femme l'a quitté. Aujourd'hui il donne une conférence par mois sur son sujet de prédilection et on le surnomme l'Astronome. Sólrún, femme du maire, directrice de l'école, nage deux fois par semaine dans la mer, quelque soit le temps, pendant que les garçons du village l'observent à la jumelle. Ágústa, la postière, lit une partie du courrier qui passe entre ses mains et se charge ensuite de distiller des informations sur la vie privée des gens. Il y a aussi Kjartan, Þorgrímur, Ásdís, Guðmundur, Elísabet... certains personnages réapparaissent tout au long du roman, d'autres ne font qu'un bref passage. Chaque chapitre est comme une petite tranche de vie et je dois dire que je me suis parfois perdue dans tous ces noms islandais.
Les faits sont rapportés de façon très descriptive par un narrateur membre de la petite communauté qui les complète par ses réflexions sur l'époque contemporaine. Il pointe les conséquences sur nos vies de l'accélération, de la société de consommation, de la destruction de l'environnement:
" Ásdís reste au rez-de-chaussée, elle éteint la lumière pour regarder par la fenêtre, mais oublie la télé, tout le salon s'emplit de cette lueur bleue qui éclaire désormais l'âme humaine et modifie nos paysages intimes".
"Tout a débuté au milieu des années 70, le monde était différent, tous les Beatles étaient vivants, on prenait l'avion sans redouter les terroristes, les routes étaient moins rapides, plus tortueuses, les distances moins longues, le monde semblait plus vaste et le bureau de poste était un carrefour d'échanges".
Dans un monde complexe certains se débrouillent mieux que d'autres pour accéder à la sérénité. Ce sont les contemplatifs de la nature comme Jónas ou ceux qui sont capables de vivre pleinement l'instant présent comme Jakob le routier. L'auteur nous invite à profiter de chaque parcelle de bonheur: le désir, le plaisir sexuel et sensuel, la contemplation des étoiles, des chiots qui courent après leur queue ou même la courbe de l'aile d'un oiseau. Car après la lumière d'été vient la nuit et après la vie la mort, parfois beaucoup plus tôt qu'on ne l'imaginait.
L'écriture est poétique, il y a de belles descriptions de la nature et souvent une pointe d'humour.
Tags : Roman, Islande
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