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Margaret Walker, Jubilee, Points
Vyry est une esclave, fille de l'esclave Netta et de son maître, John Morris Dutton. Elle était l'arrière-grand-mère de Margaret Walker qui, dans ce roman, raconte son histoire de sa petite enfance à ses premiers pas de femme libre après la guerre de Sécession. Dès l'âge de sept ans la petite Vyry est employée à la Grande Maison où Madame Maîtresse Salina la traite durement, se vengeant sur elle du comportement de son mari: Vyry a la peau blanche, les cheveux blond-roux et ressemble comme deux gouttes d'eau à Mademoiselle Liliane au point qu'on les prend parfois pour des jumelles.
C'est la vie dans une plantation de Géorgie du point de vue des esclaves que l'autrice nous présente ici. Les esclaves y sont victimes de grandes violences : viol, fouet, vente, familles ou amis séparés. Je découvre que les maîtres sont aussi enfermés par ce système pervers. Ainsi Madame Maîtresse Salina craint tellement que ses esclaves ne la volent qu'elle tient tout sous clé. Le matin elle sort des réserves alimentaires la quantité de nourriture nécessaire pour la journée. Après une réception elle surveille la femme qui lave sa vaisselle précieuse. Cette suspicion généralisée tourne parfois à la paranoïa et entraîne de nouvelles violences contre les esclaves dont on nous dépeint aussi les stratégies de survie et de résistance.
Cette société du Sud est très inégalitaire. A côté des riches planteurs on trouve aussi de nombreux petits Blancs parfois misérables et souffrant de la faim dont la couleur de la peau est le seul motif de fierté. Ceux-ci accusent les Noirs d'être responsables de leur sort et c'est encore plus le cas après la défaite sudiste. On tape sur les petits, pas sur les gros. Cela me fait penser à ceux qui aujourd'hui prétendent ou croient que les étrangers ont droit à toutes les aides en France.
Après la victoire du Nord Vyry et sa famille connaissent encore bien des vicissitudes quand ils sont victimes des conditions météorologiques, d'un escroc ou même du Ku Klux Klan
J'ai beaucoup apprécié ce très bon roman qui est paru en 1966. Comme quoi il reste toujours des bonnes choses à découvrir, même dans la littérature moins récente. Le récit est illustré de nombreuses anecdotes, parfois insignifiantes, mais qui donnent la saveur du vécu : on a l'impression d'être en train d'écouter quelqu'un qui nous raconterait ses souvenirs de famille. En même temps Margaret Walker apporte aussi des informations historiques sur le sort des Noirs libres, sur les filières d'évasion des esclaves, sur la guerre de Sécession et ses conséquences. Tout le roman est traversé par le personnage de Vyry, une femme remarquable et courageuse. Soutenue par sa foi chrétienne elle se laisse rarement abattre et n'est jamais dominée par le ressentiment. Elle forme un couple très sympathique avec son second mari.
L'avis de Enna.
Autant en emporte le vent. Un film de Victor Fleming. A droite ou à gauche je lis que Jubilee est "l'Autant en emporte le vent des Noirs américains". C'était donc l'occasion de revoir ce film.
Points communs : le cadre géographique et historique : la plantation, la guerre de Sécession.
Le sort des Noirs dans Autant en emporte le vent : C'est le regard des Blancs qui prévaut ici : les esclaves sont satisfaits de leur sort. On en voit même qui partent s'engager pour soutenir le Sud. Pour les rôles qui sont individualisés les personnages sont montrés soit comme des membres de la famille soit comme des imbéciles, incapables de se débrouiller tout seuls.
J'avais vu ce film il y a des années et j'en gardais le souvenir négatif que Scarlett (Vivien Leigh) était une enfant gâtée qui n'hésitait pas à piétiner les sentiments de ceux qui l'aimaient. A la revoyure je constate que c'est bien le cas, surtout au début -aussi elle a 16 ans- mais le côté gâté s'estompe ensuite et elle est aussi une femme forte que rien ne peut abattre. Rhett Butler (Clark Gable) m'était apparu vieux et peu séduisant, c'est toujours le cas aujourd'hui.
Tags : Roman, Histoire, Femmes, Etats-Unis, Cinéma
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