• Pınar Selek, Le chaudron militaire turc, des Femmes

    Pınar Selek, Le chaudron militaire turc, des Femmes

     

    Née en 1971, Pınar Selek est une sociologue d’origine turque. Elle a mené des enquêtes sur les groupes opprimés en Turquie (personnes homosexuelles et trans, Kurdes) et pour ces raisons s’est mise à dos le régime. En 1998, après une explosion au gaz dans le bazar aux épices d’Istanbul, les autorités prétendent qu’ils s’agissait d’un attentat et l’accusent d’y avoir participé. Elle est emprisonnée et torturée. Elle a été jugée et acquittée quatre fois. Un cinquième procès est prévu. En 2011 elle a trouvé asile en France.

     

     

    Le 19 janvier 2007 Hrant Dink, journaliste arménien et ami de Pınar Selek est assassiné. A ses obsèques Rakel Dink, la femme de Hrant, dit : « Rien ne se fera, mes ami.es, sans sonder les ténèbres qui font d’un bébé un assassin ». Pınar Selek se questionne alors sur le « rôle de la masculinité normative dans l’organisation de la violence politique » et décide de mener une étude sociologique sur le service militaire en Turquie. Ce travail a donné lieu à un livre paru en Turquie en 2009. Devenir homme en rampant, est parue en 2014. L’ouvrage est épuisé. Le chaudron militaire turc est une sorte de résumé de ce précédent ouvrage. Ce court livre de 100 pages est paru en 2023 alors que Pınar Selek devait être rejugée le 29 septembre. Ce procès a été reporté au 28 juin 2024.

     

     

    Pınar Selek distingue six étapes de l’acquisition du statut de sexe dominant en Turquie : circoncision, première expérience sexuelle, service militaire, travail, mariage, paternité. Dans les milieux traditionnels ces étapes sont l’occasion de célébrations familiales et mettent en valeur le fait d’avoir un pénis. Lors du service militaire les jeunes hommes apprennent à obéir à des ordres ineptes. Ils sont brutalisés par leurs supérieurs et leurs camarades incorporés avant eux. Cela les amène à consentir à l’organisation hiérarchique car ils savent que, en montant en grade, ils seront moins souvent battus et pourront battre à leur tour les nouveaux. Les hommes qui témoignent sont de générations très diverses. Certains ont fait la guerre de Corée (la Turquie y a participé aux côtés des forces de la coalition américaine), d’autres sont nés dans les années 1970. Tous ont subi des violences. Cette violence est acceptée par les soldats : les commandants non violents ne sont pas pris au sérieux, ce qui légitime l’usage de la violence.

     

     

    J’ai apprécié le regard féministe et j’ai trouvé intéressant la réflexion menée sur le rôle du service militaire dans la perpétuation d’une masculinité normative. Toutes proportions gardées il m’a semblé que le service militaire tel qu’il existait en France jusqu’au 20° siècle devait bien avoir le même effet.

     

    Pınar Selek, Le chaudron militaire turc, des Femmes

     


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  • Commentaires

    1
    Vendredi 1er Mars à 04:43

    Ça doit être une lecture éprouvante mais très intéressante. Cette manipulation est en tout cas effrayante et je me demande comment font les hommes pour sortir de ce moule...

      • Vendredi 1er Mars à 15:24

        Ils en sortent "cuits" -d'où l'image du chaudron- prêts à se soumettre au "Papa-Etat" comme on dit dans le langage populaire turc.

    2
    Vendredi 1er Mars à 06:57
    je lis je blogue

    je me posais la même question que Sandrine en lisant ton billet. C'est très difficile de s'affranchir d'un tel carcan. 

      • Vendredi 1er Mars à 15:25

        L'autrice dit bien aussi que les hommes sont eux-mêmes des victimes du patriarcat.

    3
    Mardi 5 Mars à 16:12

    Coucou !! Merci beaucoup pour ta chronique ! Il faut vraiment que je la lise, mais ses livres ne sont pas dans mes deux bibliothèques de quartier :S

      • Mardi 5 Mars à 16:34

        Je pense que cela devrait te plaire.

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