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Stefan Hertmans, Une ascension, Gallimard
Stefan Hertmans a vécu pendant vingt ans dans une grande demeure du quartier populaire de Patershol à Gand. Ce n'est qu'après avoir quitté cette maison qu'il a pris conscience qu'elle avait aussi été celle d'un collaborateur et SS flamand, Willem Verhulst. Autre coïncidence, Adriaan Verhulst, le fils de Willem, a été le professeur d'histoire à l'université de Stefan Hertmans qui décide de mener l'enquête sur cette famille. Nous faisons ainsi la connaissance de Willem Verhulst, devenu nazi par nationalisme flamand. Collaborateur zélé il dirige un service d'espions qui lui permettent de dresser des listes de personnes à arrêter, interner, torturer ou déporter: francophones, anglophiles, francs-maçons, Juifs... D'après ce que dit l'auteur je comprends que la collaboration en Belgique a plutôt été le fait de flamingants, par nationalisme et pangermanisme. Ce cadre historique de l'occupation de la Belgique par les Allemands est peu détaillé et j'aimerais maintenant en savoir plus sur ce sujet.
Mientje, la femme de Willem, est une Néerlandaise, chrétienne protestante et pacifiste convaincue. Son mari lui cache beaucoup de ses activités, refuse de lui répondre quand elle l'interroge à ce sujet cependant elle ne peut pas tout ignorer et, à la maison, elle résiste à sa mesure. Elle interdit à son mari de porter son uniforme de SS au domicile familial. Il a un costume civil dans une pièce où les enfants n'ont pas le droit d'entrer et doit se changer en arrivant. Elle jette dans le canal un poignard des jeunesses hitlériennes que le père a apporté pour son fils. En ces périodes de restriction les enfants ne mangent pas à leur faim car, si Willem s'est enrichi avec son activité, il en fait peu profiter sa famille mais plutôt ses nombreuses maîtresses. La dernière en date, Griet Latomme, me fait penser aux Femmes de nazis. Elle-même nazie convaincue elle garde une photo d'Hitler dans son séjour jusqu'à la fin de sa vie.
Le Symphonion
Une ascension repose sur des faits historiques et une ample documentation. L'auteur a eu accès aux mémoires rédigés par certains protagonistes et s'est entretenu avec une des filles de Willem et Mientje ainsi que d'autres témoins. La forme est cependant celle du roman, les propos et les pensées des personnages sont imaginés. Par petites touches, de façon impressionniste, Stefan Hertmans dépeint aussi les conditions de vie matérielles dans les années 1940 et 1950, en présentant notamment des objets que l'on n'utilise plus comme le Symphonion, ancêtre du tourne-disques ou du juke box. L'ouvrage est illustré d'un certain nombre de photos des objets, lieux et personnes cités. C'est une lecture que j'ai trouvée passionnante.
Tags : Roman, Histoire, Nazisme
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