• David Van Reybrouck, Congo. Une histoire, Actes Sud

     

    David Van Reybrouck est un historien, écrivain et journaliste belge. Dans ce passionnant ouvrage paru en 2010 il étudie l'histoire de la République Démocratique du Congo (Congo-Kinshasa) depuis la période coloniale jusqu'à nos jours. Pour cela il s'est appuyé sur de nombreuses sources qui sont citées mais il a aussi effectué dix voyages au Congo où il a recherché et rencontré des témoins des événements relatés. Cela va du centenaire qui a connu l'époque du Congo belge jusqu'aux émigrés en Chine qui acheminent des conteneurs de marchandises vers leur pays, en passant par l'ex-enfant soldat ou le commandant de troupes rebelles accusé de crimes de guerre par la Cour Pénale Internationale. Ces témoignages rendent le récit très vivant.

     

     

    Le Congo se classe aujourd'hui parmi les pays les plus pauvres du monde et pourtant il regorge de ressources au point qu'on a pu dire qu'il est un "scandale géologique". Je découvre pourtant que cette trop grande richesse a fait le malheur du pays. Depuis la fin du 19° siècle les candidats se sont succédé pour en piller les ressources naturelles. C'est d'abord le caoutchouc à l'époque où le territoire est la propriété personnelle du roi Léopold 2 (1885-1908). Les populations sont victimes de très grandes violences, les sociétés traditionnelles désorganisées par le travail forcé. Je retrouve des points que j'avais vus dans Un monde en nègre et blanc. Cela continue avec l'huile de palme utilisée par le britannique William Lever pour fabriquer du savon. En 1911 l'Etat belge (le Congo est une colonie belge de 1908 à 1960) lui accorde une immense concession. Cette première vague d'industrialisation entraîne une prolétarisation des habitants.

    Après l'indépendance les dictateurs corrompus (Mobutu, Kabila père puis fils) ont pillé leur propre pays. Ils se maintiennent au pouvoir par la répression et le clientélisme. Des entreprises et multinationales tirent profit de l'absence d'Etat de droit pour faire des affaires juteuses. La population est paupérisée par cette économie de pillage et chacun se débrouille comme il peut. Pourquoi être honnête quand l'exemple du contraire vient d'en haut ? Sous Mobutu la compagnie aérienne nationale Air Zaïre est surnommée Air Peut-être avec comme slogan : "La seule chose au Zaïre qui ne vole pas" (sous Mobutu -1965-1997- le pays porte le nom de Zaïre).

    Enfin, depuis 1996 le Congo est le terrain de guerres dans lesquelles sont intervenus plusieurs pays voisins (Angola, Ouganda, Rwanda, Burundi) mais aussi l'ONU et l'Union européenne. Le point de départ en est le génocide au Rwanda mais ensuite les combattants se transforment en pilleurs des ressources minières : cuivre, or, diamants, coltan... Officiellement la Seconde guerre du Congo a pris fin en 2002, dans les faits certaines régions du pays sont encore en 2010 sous le contrôle de rebelles.

    A propos du génocide au Rwanda je suis gênée par la façon dont l'auteur dédouane la France de sa responsabilité. "Mitterrand ne savait pas (...) qu'il protégeait (...) les auteurs du génocide". Du coup cela jette pour moi un petit doute sur toute la façon dont les événements en rapport avec ce génocide sont traités.

     

     

    Malgré ce bémol j'ai vraiment apprécié cette lecture. Je connaissais très peu l'histoire du Congo et j'ai appris beaucoup de choses intéressantes. L'objectif de l'auteur c'est de montrer que l'histoire du Congo s'inscrit pleinement dans l'histoire mondiale et il me semble qu'il y parvient. Si le sort du peuple congolais est terrible David Van Reybrouck ne se contente pas de lister des atrocités. Il fait état des résistances depuis l'époque coloniale et met l'accent sur le dynamisme de la jeunesse notamment au travers de la musique. De nombreux groupes et chansons populaires sont cités, que j'ai découverts. Il termine sur la note d'espoir que le commerce avec la Chine puisse être une opportunité pour le Congo. On sent qu'il aime le pays. Malgré ses près de 600 pages j'ai trouvé l'ouvrage tout à fait accessible.

     

    L'avis de Sunalee.


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  • Commentaires

    1
    Jeudi 22 Octobre 2020 à 06:53

    Je me souviens l'avoir noté il y a quelques années. Il a l'air vraiment intéressant. On retrouve finalement assez souvent cette malédiction s'abattant sur des pays au sous-sol (trop) riche...

      • Jeudi 22 Octobre 2020 à 14:13

        Oui, un ouvrage fort intéressant.

    2
    Dimanche 25 Octobre 2020 à 08:03
    Sunalee

    Je n'avais absolument pas tiqué sur ton bémol, comme quoi, les lectures sont toujours différentes.

    Merci pour la mention !

      • Dimanche 25 Octobre 2020 à 14:25

        De même je n'ai pas été frappée par ce que tu dis de la traduction. Et pourtant j'étais prévenue.

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