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Nicolas Mathieu, Connemara, Actes sud
A 38 ans Hélène a réalisé ses rêves d’adolescence : elle a quitté la petite ville de Cornécourt où elle est née et habite maintenant une belle maison à Nancy, elle occupe un poste très bien payé dans un cabinet de consulting. Depuis quelque temps elle est cependant insatisfaite de ce qu’elle a obtenu et qui ne suffit pas à donner un sens à sa vie. Par hasard elle retrouve Christophe, ancienne gloire du lycée dont elle fut secrètement amoureuse à 14 ans. A 40 ans Christophe vit toujours à Cornécourt. Il est représentant en croquettes pour chien, habite avec son père, s’occupe de son fils une semaine sur deux, se bourre la gueule régulièrement avec ses anciens copains de lycée et rêve de rejouer au hockey sur glace. L’histoire se déroule durant les six mois qui ont précédé l’élection d’Emmanuel Macron. Six mois d’une parenthèse durant laquelle Hélène et Christophe vont revivre les émois de leur adolescence, quand tout semblait possible.
La peinture des sentiments et de l’impatience de l’adolescence est fort bien traitée, il me semble, via les souvenirs d’Hélène. Les enfants qui grandissent, le souvenir d’un parent décédé, sont l’occasion de passages nostalgiques qui me touchent.
Avec Hélène, qui est clairement son personnage principal, Nicolas Mathieu montre la place des femmes dans le patriarcat. A la maison c’est sur elle que repose la charge mentale des enfants ; au travail, alors qu’elle est un pilier de la boîte, c’est un homme nouvellement arrivé qui est choisi pour être promu.
Le roman est aussi l’occasion pour l’auteur de pourfendre le néolibéralisme et la société de consommation, les cabinets de consulting qui vendent très cher du vent et la start up nation à venir. C’est assez efficace car il a le sens de la formule qui frappe juste :
« Inventer une région, il fallait quand même être gonflé, et ne rien comprendre à ce qui se tramait dans la vie des gens, leurs colères alanguies, les rognes sourdes qui couvaient dans les villes et les villages, tous ces gens qui par millions, le nez dans leur assiette, grommelaient sans fin, mécontents d’être mal entendus, jamais compris, guère respectés, et se présumaient menacés par les fins de mois, les migrations et le patronat, grignotés depuis cinquante ans facile dans leurs fiertés hexagonales et leurs rêves de progrès. Aller leur foutre le Grand Est pour règlement des problèmes, les mecs osaient tout. »
C’est un roman que j’ai lu facilement et que j’ai plutôt apprécié. Je me pose cependant la question du regard que l’auteur pose sur certains personnages. Je retrouve cette gêne dans le passage que je cite ci-dessus : dans « se présumaient menacés » je lis comme une critique qui ne s’assume pas et j’y vois de la condescendance
Tags : Roman, Femmes
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Commentaires
je traine ce livre depuis un mois sans le finir, la qualité du livre n'a rien à voir avec ce fait assez inhabituel chez moi mais j'ai trop de sollicitaions qui me prennent plus qu ecette lecture. Je vais finir ! un jour ...
Je serai intéressée de lire ton avis.