• Patrick Deville, Amazonia, Seuil

     

    Patrick Deville, Amazonia, Seuil"Nous ne voyageons pas pour le plaisir de voyager que je sache, dit Camier, nous sommes cons, mais pas à ce point là." Samuel Beckett

     

    En 2018 Patrick Deville voyage de nouveau en Amérique latine. Cette fois il a entrepris la traversée de l'Amazonie d'est en ouest, de Belém au Brésil à Guayaquil en Equateur en passant par le Pérou et il est accompagné de son fils Pierre, 29 ans. Il donne des descriptions de lieux qui me paraissent fantastiques comme le canal de Casiquiare, énigme orographique qui relie le rio Negro à l'Orénoque. A Manaus il est question de l'exploitation du caoutchouc qui fit de ce village la ville la plus riche du monde à la fin du 19° siècle, où fut construit un théâtre luxueux tandis que les pavés de la place qui le borde étaient recouverts de caoutchouc pour atténuer le bruit des fiacres pendant les représentations. A Iquitos au Pérou il est question de la Casa de fierro, maison de fer construite par Eiffel, exposée à l'exposition internationale de Paris en 1889 et acheminée jusque là en pièces détachées. Moi qui ai eu la chance de voyager un peu en Equateur je retrouve avec plaisir des endroits où je suis passée.

     

    Patrick Deville, Amazonia, Seuil

     Le théâtre de Manaus

     

    Comme à son habitude il convoque aussi le souvenir de ceux qui ont arpenté ce territoire avant lui : vrais héros, aventuriers improbables et perdants magnifiques. Je fais la connaissance de Luis Carlos Prestes, chef de l'insurrection militaire Paulista, en 1924 au Brésil et de Virgulino Ferreira da Silva, connu sous le nom de Lampiao, bandit enrôlé par l'armée pour lutter contre la colonne Prestes. Le premier fini mieux que le second. Celui qui me plaît le plus c'est Alexandre de Humboldt, immense savant, anticolonialiste, anticlérical et abolitionniste. Au Mexique, avec le botaniste Aimé Bonpland, ils établissent un lien entre l'exploitation coloniale et la destruction environnementale, les terres rendues stériles par les monocultures. Cela se passe au début du 19° siècle. Voici un personnage sur lequel j'en lirais volontiers plus.

     

    Patrick Deville, Amazonia, Seuil

     La maison de fer d'Iquitos

     

    Ce temps passé avec son fils est surtout pour l'auteur l'occasion de s'interroger sur les relations père-fils. Il nous présente donc des duos familiaux littéraires ou réels comme Jean, dans Le superbe Orénoque de Jules Verne, qui recherche son père disparu au Vénézuela ou Edgar Maufrais, modeste comptable à l'arsenal de Toulon, qui arpenta l'Amazonie de 1952 à 1964 dans l'espoir d'y retrouver son fils Raymond, aventurier malheureux. Patrick Deville se remémore des voyages faits avec Pierre enfant, observe l'homme qu'il est devenu, s'interroge sur leur ressemblance et leur relation, sur ce que c'est que d'être un père acceptable, sur cette part de nos enfants qui nous échappera toujours. Je trouve ces passages particulièrement touchants. Il me semble que c'est une belle preuve d'amour paternel qui est apportée là. Il répète le propos d'un psy pour lequel la note idéale pour un père serait celle de 12/20. Attention, M.Deville, vous êtes en risque de passer au-dessus avec ce livre.

     

     

    Il est pas mal question de ses anciens voyages en Amérique du sud, en Afrique, en Asie, en France. Ce sont des choses que j'ai déjà lues et que je retrouve sans trop de déplaisir même si il me semble que ça pourrait lasser. Mais c'est bien écrit et c'est intelligent et pour l'instant j'ai toujours plaisir à lire les beaux récits de Patrick Deville.


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  • Commentaires

    1
    Mercredi 18 Mars 2020 à 07:14

    Je note ! Je suis en train de lire justement un livre sur l'Amérique du Sud ( The last city of Z) passionnant ! Tu l'as lu ?

      • Mercredi 18 Mars 2020 à 09:22

        Non. J'attends ton commentaire, alors.

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