• Gueorgui Vladimov, Le fidèle Rouslan, 10-18"Dans ce petit square -tout comme au terrain d'exercice- deux hommes sans vie, couleur gamelle d'aluminium, se tiennent perchés Dieu sait pourquoi sur des socles : l'un, sans bonnet, à le bras tendu en avant, la bouche ouverte, comme s'il venait de jeter sa canne et s'apprêtait à ordonner : "rapporte!"; l'autre, coiffé d'une casquette, ne montre rien du bras mais a la main glissée sous le revers de sa tunique d'uniforme : tout, dans sa personne, laisse entendre que c'est à lui qu'il faut "rapporter"."

     

    Ecrit dans les années 1960, Le fidèle Rouslan a circulé en URSS sous forme de samizdat avant de paraître anonymement en Allemagne en 1975.

     

     

    Rouslan est chien de garde dans un camp du goulag. Après la mort de Staline (1953), les camps sont fermés petit à petit et les prisonniers libérés. Du jour au lendemain Rouslan se retrouve sans emploi et sans comprendre ce qui lui arrive. Alors qu'il tente de survivre et de donner un sens aux événements il se souvient de l'époque de son dressage et des années de Service qui ont suivi.

     

     

    A travers le personnage de Rouslan l'auteur nous présente la répression dans un camp du goulag, la mise au pas des prisonniers par la terreur. Le roman montre aussi comment, même après la libération physique, le formatage effectué sur les détenus et leurs gardiens, les violences qu'ils ont subies ou fait subir, les empêchent de s'adapter à une autre vie. L'interprétation personnelle que fait Rouslan des événements permet à l'auteur de jeter un regard sarcastique sur le régime totalitaire soviétique. J'ai apprécié cette lecture.

     

     

    L'avis d'Henri.

     


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  • Ieva Ozolina, 50 mitaines et moufles à tricoter comme en Lettonie, Editions de Saxe

     

    Après les chaussettes et les bonnets je tricote cette année des moufles pour mon entourage. Comme vous pouvez le constater ci-dessus j'ai déjà bien avancé la réalisation de mes cadeaux de Noël et je continue. Difficile de résister aux modèles somptueux que contient ce livre. Elles sont toutes en jacquard.

     

     

    Dans l'introduction j'apprends qu'en Lettonie les moufles faisaient traditionnellement partie du trousseau de la mariée, les plus riches d'entre eux pouvant en comprendre plusieurs centaines de paires ! Je me demande ce qu'on pouvait bien faire de tout ça. On nous annonce en quatrième de couverture qu'on va découvrir "l'histoire fantastique des moufles lettones" mais je trouve en ce qui me concerne que les explications historiques sont bien trop rapides.

     

     

    Ce qui me manque aussi ce sont des explications claires pour tricoter en jacquard avec plus de deux laines. Certains des modèles proposés ici sont réalisés avec quatre couleurs différentes de laine sur le même rang. Pour l'instant je ne me suis pas encore lancée dedans et je n'ai pas trouvé de tuto sur internet qui me montre comment gérer tous ces fils en même temps.

    Chaque modèle est illustré d'une photo et d'une grille jacquard et est donné en une seule taille. J'ai du parfois modifier un peu la grille pour adapter le modèle à la taille que je souhaitais.

    L'autrice préconise d'utiliser un jeu de cinq aiguilles double pointe, je fais ça très bien avec mes aiguilles circulaires et je trouve même que c'est plus facile.

    J'ai appris comment on faisait une ouverture pour le pouce.

     


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  • Nicholas Evans, Les blessures invisibles, PocketL'écrivain britannique Nicholas Evans est mort le 9 août 2022. Né en 1950 il était surtout connu pour son premier roman, L'homme qui murmurait à l'oreille des chevaux, adapté au cinéma par Robert Redford. Il semble que tous ses romans se déroulent, au moins en partie, dans le Montana.

     

     

     

     

    Nicholas Evans, Les blessures invisibles, PocketLes blessures invisibles. Accusée de meurtre, la mère de Tom Bedford a été condamnée à mort et exécutée quand il avait 13 ans. Pour ne pas avoir à en parler, Tom a inventé une version alternative mais le traumatisme créé par ce drame l'a séparé de sa femme et de son fils Danny auxquels il a toujours caché la vérité. Mais voici que Danny, soldat engagé en Irak, est accusé d'être responsable de la mort de civils. Il encourt la peine de mort. Ces événements vont obliger Tom à affronter enfin son passé.

     

     

    La narration alterne entre le début des années 1960, quand Tom et sa mère, jeune actrice prometteuse, vivent le rêve hollywoodien et les années 2000, temps présent du procès de Danny. Ces aller-retour sont l'occasion pour l'auteur de nous présenter le monde du cinéma, décrit comme artificiel et où les relations sont fausses, et le traumatisme qu'a été la seconde guerre du Golfe pour un certain nombre de soldats américains. Je n'ai pas vraiment apprécié ce roman. Je l'ai lu sans difficulté mais il m'a semblé que les thèmes abordés l'étaient de façon convenue et que l'auteur enfilait un peu trop facilement les lieux communs. Ainsi le milieu du cinéma est montré comme celui des faux-semblant et, par l'exemple du western, opposé aux sentiments vrais des vrais cow-boys du Montana. J'ai tendance à penser que la réalité est toujours plus nuancée. Par ailleurs Nicholas Evans a chargé la barque de ce pauvre Tom Bedford en ajoutant au traumatisme dont j'ai parlé précédemment un secret trouble entourant sa naissance et ses premières années et un séjour dans un internat anglais où il a été martyrisé par des professeurs et des condisciples sadiques. Cela fait un peu beaucoup. Je ne peux m'empêcher de penser que cela a surtout pour but de remplir des pages.

     


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  • Sofi Oksanen, Quand les colombes disparurent, Stock En Estonie, pendant la seconde guerre mondiale et après, deux cousins font des choix très différents face à l'histoire tourmentée de leur pays. Roland lutte pour l'indépendance, contre les Soviétiques, contre les nazis puis de nouveau contre les Soviétiques. Il vit dans la clandestinité. Edgar, au contraire, a à coeur d'être toujours du côté du manche. Quels que soient les maîtres, nazis ou communistes, il s'emploie à en pourchasser les opposants et à effacer les traces de ses précédentes allégeances. Juudit, sa femme, est tombée amoureuse d'un officier allemand avec qui elle a noué une relation dont le devenir l'angoisse profondément. Elle tente de faire passer son anxiété grâce à l'alcool et à la Pervitine.

     

     

    La narration alterne entre la seconde guerre mondiale (1941-1944, période où l'Estonie est occupée par l'Allemagne) et les années 1960, quand le pays est annexé à l'URSS. J'ai mis un peu de temps à entrer dans ce roman. Les événements sont souvent évoqués de façon allusive, l'histoire de l'Estonie supposée connue du lecteur et il y a un certain nombre de choses que j'ai comprises petit à petit. Le dénouement met tout en place. On pourrait dire que tout s'éclaire si ce n'est que c'est un épilogue que j'ai trouvé très sombre. Le message, pour moi, c'est que les régimes totalitaires qui basent leur existence sur la surveillance des citoyens et la répression favorisent la délation et promeuvent des individus totalement dénués de scrupules. Clairement ce n'est pas le meilleur de la nature humaine qui domine dans ces périodes.

     


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    C'est l'automne et il commence à faire froid. Pour se donner du courage, quelques clichés, souvenirs de vacances en 2021 et 2022.

     

    Par la fenêtre de ma chambre d'hôtel - 5

    Hôtel de l'Europe, Poitiers

     

    Par la fenêtre de ma chambre d'hôtel - 5

    Aletti palace hôtel, Vichy

     

    Par la fenêtre de ma chambre d'hôtel - 5

    Sunna guesthouse, Reykjavik (Islande)

     

    Par la fenêtre de ma chambre d'hôtel - 5

    Casa Carpintera, Escalona (Espagne)

     

    Par la fenêtre de ma chambre d'hôtel - 5

    Hôtel du Palais, Rochefort

     

    Par la fenêtre de ma chambre d'hôtel - 5

    Auberge Normande, Ronce les Bains


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  • Marc Paillet, La salamandre, 10-18 Au printemps 800 Erwin le Saxon est en mission d'inspection à Lyon où le roi Charles envisage de passer plus tard dans l'année en se rendant à Rome (Charlemagne y est couronné empereur à Noël 800). Alors qu'il enquête sur le meurtre d'un maréchal des écuries royales Erwin met au jour un complot d'envergure contre le roi. Il aura besoin de l'aide de ses assistants, Timothée le Grec, frère Antoine et Dorémus ainsi que de Lyonnais de bonne volonté pour déjouer les plans des perfides et des félons.

     

     

    Cette aventure d'Erwin est l'occasion de nous présenter la situation politique troublée en Europe à cette époque, notamment autour du pape Léon 3. La ville de Lyon apparaît comme une cité cosmopolite, centre de commerce à l'international, exercé par la communauté juive et des levantins, chrétiens d'orient installés là depuis plusieurs générations et appelés Syri. Les une et les autres sont facilement l'objet de médisances et de rumeurs. J'ai trouvé que les ramifications de l'enquête étaient un peu tortueuses mais j'aime bien l'ambiance de ces romans.

     


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  • Marc Paillet, Le poignard et le poison, 10-18A l'hiver 796 l'abbé saxon Erwin et le comte palatin Childebrand sont missionnés par le roi Charles pour aller enquêter à Autun. L'évêque Martin 2 s'est en effet plaint auprès de Charles des agissements du comte Thiouin. Peu après leur arrivée Erwin et Childebrand sont conviés à un banquet par le comte. Lors de cette soirée bien arrosée le vicomte Aldric fait un esclandre. Peu après il est retrouvé mort, empoisonné.

     

     

    L'enquête autour de cette mort est la première que mènent ensemble nos deux héros, missi dominici de Charlemagne. Childebrand est un rude guerrier. Parent de Charles il est convaincu de sa supériorité et a du mal au début à accepter la compagnie d'Erwin, intellectuel taciturne. Ce dernier recherche des éléments de preuve par l'enquête et préfère éviter les aveux sous la torture. Je constate cependant que c'est une justice de classe qui est menée là : le simple garde est condamné à mort, ses chefs, membres de l'aristocratie, privés de leurs biens ou condamné à finir ses jours dans un couvent. C'est une lecture que j'ai trouvée plaisante.

     


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  • Arnaldur Indridason, Dans l'ombre, Points Reykjavik, 1941. Un voyageur de commerce en apparence sans histoire est retrouvé assassiné d'une balle dans la tête. Cela ressemble à une exécution et une croix gammée a été tracée au sang sur le front de la victime. La balle provient d'une arme du modèle de celles utilisées par les soldats américains qui occupent l'Islande à cette époque aussi à Flovent, policier islandais chargé de l'enquête, les troupes d'occupation adjoignent-elles Thorson. Né au Canada, fils d'immigrés islandais, c'est un Islandais de l'ouest. L'enquête des deux hommes va les mener sur la trace de nazis islandais et leurs recherches pour isoler un soit-disant gène du crime.

     

     

    Ce qui m'a le plus intéressée dans ce roman, c'est le contexte historique. Il y a eu un parti nazi en Islande qui a été interdit en 1940. Les nazis se sont intéressés aux Islandais dont ils pensaient qu'ils étaient de purs représentants d'une race nordique descendant des Vikings.

    Entre 1940 l'île est occupée par les troupes britanniques puis américaines. Les Islandais appellent cela la "situation". On dit d'une femme qui entretient une liaison avec un soldat étranger qu'elle est "dans la situation" et on parle "d'enfants de la situation" pour désigner le fruit de ces relations.

    J'apprécie aussi de retrouver, dans les descriptions de certains quartiers de Reykjavik, des lieux que j'ai vus lors de mon récent séjour en Islande. J'ai été moins convaincue par l'enquête policière que j'ai trouvée poussive. Cet ouvrage est le premier d'une trilogie mais il n'appelle pas de suite et c'est très bien car la lecture ne m'a pas donné envie de continuer.

     


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  • Anne-Marie Garat, Dans la main du diable, BabelAnne-Marie Garat est morte le 26 juillet 2022. Elle était née à Bordeaux en 1946 de parents ouvriers. Elle était passionnée par le cinéma et la photographie, deux arts dont il est question dans le roman que j'ai lu, encore à leurs débuts à l'époque dont il est question mais traités de façon fort intéressante.

     

     

     

    Anne-Marie Garat, Dans la main du diable, BabelDans la main du diable. Orpheline toute petite, Gabrielle Demachy a été élevée par sa tante Agota Kertész, une immigrée hongroise. Elle est tombée amoureuse de son cousin Endre. Nous sommes à Paris en 1913 et Endre n'a plus donné de nouvelles à ses proches depuis son départ en Asie comme ingénieur chimiste en 1908. Convoquées au ministère de la guerre Agota et Gabrielle apprennent la mort d'Endre en Birmanie cinq ans plus tôt. Après le choc de la nouvelle, Gabrielle veut comprendre ce qu'il est arrivé à celui qu'elle considère comme son fiancé. Sur les conseils de Michel Terrier, employé du ministère, elle se fait engager comme institutrice de Millie, quatre ans, dans la famille Bertin-Galay, industriels du biscuit. Le docteur Pierre Galay, père de Millie, aurait en effet croisé Endre en Birmanie et Gabrielle espère apprendre auprès de lui les circonstances de la mort de son cousin.

     

     

     

    C'est un véritable roman-feuilleton cette histoire, avec des rebondissements rocambolesques dont Anne-Marie Garat sème des indices ce qui fait que le lecteur a souvent un pas d'avance sur Gabrielle dans son enquête. Elle va devoir démasquer les mauvais coups d'un méchant particulièrement pervers qui me semble un proto fasciste.

    Ce que j'ai apprécié en plus de ces aventures c'est le cadre historique et social de l'année 1913-1914 : il est question de la guerre des Balkans (1912-1913), de la crise coloniale au Sahara et au Maroc, de la semaine rouge, semaine d'insurrection populaire en Italie en 1914. Avec en plus des clins d'oeil au lecteur qui sait lui que tout cela va déboucher sur la Première Guerre Mondiale. Son enquête amène Gabrielle à vivre dans l'intimité d'une famille de la grande bourgeoisie industrielle mais aussi à fréquenter un jeune anarchiste qui lui fait découvrir les quartiers populaires les plus misérables.

    Tout ceci est de plus fort bien écrit, l'analyse des motivations et des sentiments des personnages est approfondie et pertinente.

    Enfin il y a des personnages très sympathiques et au destin desquels je me suis attachée, notamment des femmes fortes, indépendantes ou en recherche de liberté. Je pense à Gabrielle mais aussi à sa grande amie Dora, à Mme Mathilde, la patronne à poigne de la biscuiterie Bertin-Galay mais aussi à Sophie, épouse bafouée qui s'émancipe de façon plutôt réjouissante.

     

     

     

    Pour toutes ces raisons c'est un roman que j'ai extrêmement apprécié, premier tome d'une trilogie dont je lirai sans doute la suite mais pas tout de suite car ce premier épisode compte 1288 pages et les deux suivants chacun près de 1000. Cette lecture est donc ma seconde participation au défi pavé de l'été de Brize.

     

    Anne-Marie Garat, Dans la main du diable, Babel

     


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  • Paul Auster, Mr Vertigo, Actes SudA Saint Louis en 1927, Walter Raleigh est un orphelin de 9 ans, gamin déluré recueilli par un oncle qui le maltraite, quand il fait la connaissance d'un personnage mystérieux qui le convainc de le suivre en lui promettant de lui apprendre à voler. Auprès de son maître Yehudi Walt va découvrir l'amitié et l'importance des amis.

     

     

    C'est un roman d'apprentissage que nous avons là et un apprentissage bien douloureux au départ. Le narrateur est Walt écrivant ses souvenirs au soir d'une vie riche en péripéties. Car non seulement notre héros va apprendre à voler et se donner en spectacle mais son histoire suit celle des Etats-Unis du milieu des années 1920 à la fin du 20° siècle. Il est donc question de la crise économique, des crimes du Ku Klux Klan, de la prohibition et des gangs de Chicago. Il est aussi beaucoup question de base ball car Walt est un fan des Cardinals de Saint Louis. J'ai apprécié ces aspects historiques et culturels. C'est un livre que j'ai lu plutôt facilement. Paul Auster fait preuve d'une grande imagination. Cela fait longtemps que je n'avais pas lu cet auteur que j'ai beaucoup apprécié à une époque et il m'a semblé que Mr Vertigo n'était pas aussi excellent que les souvenirs que j'avais d'autres oeuvres de lui. Je me demande si c'est en effet le cas ou si ce sont mes goûts qui ont changé.

     

     

    En ce 15 septembre La bouche à oreilles organise une lecture commune de Moon Palace en souvenir de Goran. Moon Palace faisait partie du top 100 de Goran. L'ayant déjà lu j'ai choisi un autre livre de Paul Auster. En relisant mon compte rendu de Moon Palace je constate qu'on retrouve les mêmes thématiques dans les deux romans.

     

     

     

     


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