• Avis de déménagement

     

    Plusieurs lecteurs ont attiré mon attention sur la difficulté à poster des commentaires sur ce blog du fait de trop nombreuses images de voitures ou de feux tricolores à cliquer. De mon côté, j’ai constaté d’autres dysfonctionnements : je ne reçois plus de mail d’avertissement lorsqu’un commentaire est posté, le nuage de tags fonctionne de façon approximative et enfin la plateforme reste en http. Une rapide visite au forum d’Eklablog m’apprends que d’autres utilisateurs se plaignent des mêmes choses que moi et qu’il leur est répondu que c’est de leur faute (de leur messagerie, de leur pare feu…).

     

    J’ai longuement réfléchi, j’ai beaucoup hésité et je me décide enfin : je déménage mon blog vers WordPress : c’est ici https://monbiblioblog.fr/

     

    Mon (premier) Biblioblog date de fin 2005. Il était d’abord hébergé chez Over-blog que j’ai quitté en 2013 pour Eklablog. Je retrouve aujourd’hui ce que j’avais ressenti à l’époque : c’est une sorte d’arrachement, comme un vrai déménagement. Je quitte un endroit où j’avais pris mes marques et il faut tout reconstruire. C’est aussi l’occasion de découvrir des nouvelles choses. Aujourd’hui je suis aidée par mon frère, infographiste, que je remercie encore pour son soutien technique.

     

    Je me propose d’organiser ce déménagement en plusieurs étapes :

    1) Une période, que j’envisage jusqu’en septembre, où je vais poster mes articles sur les deux blogs, le temps de finir d’organiser le nouveau et de prendre de nouvelles habitudes.

    2) Ensuite, les nouveaux articles plus que sur le nouveau blog mais l’ancien encore en ligne le temps de déménager tous les vieux articles (ce que j’ai déjà commencé). Il y en a plus de 1000, ça peut prendre plusieurs années…

    3) Disparition du vieux blog ?


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  • L’écrivain américain Paul Auster est mort le 30 avril 2024, il était né en 1947. Cet immense écrivain avait publié près de 40 livres traduits dans une quarantaine de langues. Le succès n’a pas été immédiat cependant et ses débuts en littérature difficiles. C’est Moon Palace qui lui apporte la reconnaissance aux Etats-Unis et Léviathan en France, pays où Paul Auster a vécu quatre ans quand il était jeune. J’ai moi-même découvert Paul Auster avec Léviathan, une première lecture qui remonte avant la création de ce blog et qui m’avait plu au point que j’ai beaucoup lu l’auteur dans les années qui ont suivi. Paul Auster était l’époux de Siri Hustvedt, une autrice que j’apprécie aussi et que je devrais relire.

     

     

    Sunset Park. A l’âge de 17 ans Miles Heller a provoqué la mort accidentelle de son demi-frère, responsabilité qu’il n’a jamais avoué à personne. Depuis plus de dix ans il est dévoré par la culpabilité et, sept ans avant le début du roman, il a abandonné ses études et quitté sa famille sans plus leur donner de nouvelles. A 28 ans il est installé en Floride où il a trouvé une forme d’équilibre quand il doit de nouveau partir. Il revient alors à New-York chez son ami Bing Nathan -seule personne de son passé avec qui il soit resté en relation- qui habite un squat à Brooklyn avec deux jeunes femmes. Miles va trouver le courage de reprendre le contact avec ses parents.

     

     

    Le récit se déroule à l’époque de la crise des subprimes qui affecte la situation économique de plusieurs protagonistes. Miles et ses proches me sont fort sympathiques. Ce sont des gens qui réfléchissent, aimants, engagés, fidèles en amitié. Je ne peux m’empêcher d’être attristée par le mal être de Miles qui se répercute sur ceux qui l’aiment. Paul Auster excelle à raconter les histoires de ses personnages et leurs aléas, leurs interrogations. L’analyse psychologique est très bien menée.

     

     

    Le roman est aussi pour l’auteur l’occasion de nombreuses références culturelles : il est question du film Les plus belles années de notre vie (1946) qui a été vu et apprécié par quasiment tous les personnages ; il est question de base-ball qui était une passion de Paul Auster ; il est question de littérature, il est question de l’écrivain dissident chinois Liu Xiaobo, alors en prison (le roman est paru en 2010). Coïncidence, au moment où je lis un passage sur le prix Nobel de la paix mort en détention en 2017, Xi Jinping est en visite à 50 kilomètres de chez moi et la presse locale se félicite de ce que seront servis au menu porc noir de Bigorre et haricots tarbais. Il ne faudrait surtout pas gâcher la fête avec l’évocation des milliers de Ouïghours, opposants ou défenseurs des droits humains détenus en Chine.

     

     

    C’est un roman que j’ai trouvé agréable à lire.


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  • Maryse Condé, Ségou 2, La terre en miettes, Pocket Dans la seconde moitié du 19° siècle, les enfants et petits-enfants des personnages principaux du premier tome sont des témoins plus ou moins directs de la chute du royaume de Ségou et de l’expansion coloniale des Européens.

    En 1861, Ségou passe sous le contrôle des Toucouleurs musulmans et de leur chef El-Hadj Omar. Dans la guerre qui les a opposés à ces conquérants, les Bambaras animistes se sont alliés aux Peuls musulmans. Mohammed, le fils de Tiékoro, a perdu une jambe à la bataille de Kassakéri (1856). Après lui son fils Omar lutte aussi pour l’indépendance de la ville de ses ancêtres. Père et fils sont tous deux des musulmans convaincus, tentés par l’ascétisme et qui vivent très mal les combats entre musulmans.

     

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  • Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud 1. Quelque part entre les ombres

    Le détective privé John Blacksad enquête sur le meurtre de son ancien amour, l’actrice Natalia. Cette bande dessinée reprend tous les codes du roman noir classique : privé taciturne, femme fatale, loubards à la solde d’un homme d’affaire malhonnête, police impuissante. L’originalité et la grande réussite est que les personnages sont des animaux -ou plus exactement des animaux anthropomorphes, tête d’animal sur un corps (plus ou moins) humain- : Blacksad est un chat (noir), le commissaire Smirnov un chien loup…

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud

     

    Certains animaux sont particulièrement bien choisis, en fonction du caractère supposé de l’animal qui s’accorde avec celui du personnage représenté. Le dessin est fin et les détails soignés, je trouve cela très bien réussi et plaisant à lire.

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud

     

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud 2. Arctic Nation

    Blacksad est engagé par une directrice d’école dévouée pour enquêter sur la disparition d’une de ses élèves. Il découvre alors que le quartier périphérique de The Line où se passent les faits est le théâtre d’affrontements racistes. Un groupuscule fasciste de suprémacistes blancs baptisé Arctic Nation fait régner la terreur. Lors de son enquête notre héros fait la connaissance du journaliste Weekly, une fouine qui ne se lave que trop rarement.

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud

     

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud 3. Âme rouge

    Blacksad retrouve par hasard une vieille connaissance de sa jeunesse, le professeur Otto Liebber, brillant savant atomiste. Il fait aussi la connaissance de la belle Alma Mayer, écrivaine, dont il tombe amoureux. Quand un proche de Liebber est assassiné, notre héros acquiert la conviction qu’il s’agit d’une erreur et que c’est son vieil ami qui était visé. Le professeur cacherait-il quelque chose ?

    Le cadre est celui du début de la Chasse aux sorcières avec des manifestations anti « rouges ». Cette époque est aussi une période d’affrontements autour de l’arme nucléaire. Certains -le professeur Liebber- pensent qu’elle peut être une garantie pour la paix, d’autres sont terrorisés à l’idée d’une guerre atomique au point de creuser un abri dans leur jardin.

     

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud 4. L’enfer, le silence

    Blacksad est à la Nouvelle Orléans où il a été embauché par le producteur de musique Faust Lachapelle pour y retrouver le musicien Sebastian Fletcher, dit « Little Hand », qui a disparu. Il fait équipe avec Weekly, journaliste précédemment croisé.

    L’ambiance est excellemment rendue. C’est celle des bars à musique et du carnaval avec une vieille sorcière qui pratique la magie qui guérit (?).

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud

     

     

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud 5. Amarillo

    A la poursuite d’une voiture volée, Blacksad croise une bande de motards, un écrivain maudit, un avocat prêt à prendre toutes les affaires, une riche héritière en fuite cachée dans un cirque et deux policiers qui lui en veulent depuis Âme rouge.

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud

     

     

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud 6. Alors, tout tombe, 1ère partie

    Blacksad est embauché par Kenneth Clarke, président du syndicat des travailleurs du métro, qui s’oppose à la construction d’autoroutes urbaines et au démantèlement du réseau de transports en commun et dont la vie est menacée pour cette raison. Il affronte la mafia des belettes au service du maire et de son chef des travaux, Solomon, un mégalomane qui veut marquer la ville de son empreinte.

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud

     

    Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Blacksad, Dargaud

     

     

    7. Alors, tout tombe, 2nde partie

    Blacksad mène l’enquête sur le meurtre de Kenneth Clarke et sur celui d’Iris Allen, directrice d’une compagnie de théâtre et créatrice du festival Shakespeare in the park.

     

     

     

     

     

    Un récent compte-rendu chez Je lis, je blogue m’a donné l’envie de revenir à cette série dont j’avais déjà lu les cinq premiers tomes. Je la trouve excellente. L’ambiance des romans noirs des années 50 me paraît particulièrement bien rendue avec les gangs mafieux, les dirigeants corrompus et les enquêtes complexes à plusieurs niveaux. Le dessin est superbe, fourmille de détails réalistes et s’accorde particulièrement bien au scénario. C’est plein d’invention, une vraie réussite et toujours un régal à la relecture.


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  • Lori Saint-Martin, Pour qui je me prends, Editions de l’OlivierL’écrivaine et traductrice canadienne Lori Saint-Martin est morte le 21 octobre 2022. Je découvre sa mort, pas si ancienne, en même temps que son existence, en lisant ce récit conseillé par une amie. Lori Saint-Martin était née Lori Farnham en 1959 en Ontario dans une famille ouvrière anglophone. Dès l’enfance elle ressent la nécessité de s’extraire de son milieu d’origine. Elle a réalisé un parcours original de transfuge de classe qu’elle décrit et analyse dans Pour qui je me prends.

     

     

    Lori Saint-Martin, Pour qui je me prends, Editions de l’OlivierLori Saint-Martin est une enfant différente, neuroatypique je dirais, qui pense en images : « Je voyais toutes mes pensées, comme une narration faite en direct, apparaître dans de petites bulles de bande dessinée. En dehors de moi, comme dactylographiées au fur et à mesure ».

    A 10 ans elle commence l’étude du français et comprend que cette langue sera sa porte de sortie pour fuir son destin (ne pas faire d’études, se marier jeune, être femme au foyer). Elle s’est investie dans son apprentissage au point qu’elle parle le français sans accent étranger et le considère comme sa langue maternelle. Pour couper les ponts avec son passé elle a changé de nom, cessé de parler l’anglais -sauf avec ses parents- et rayé de son CV les quelques articles qu’elle avait écrits en anglais. Quand elle annonce à sa mère qu’elle est enceinte, celle-ci fond en larmes : « Mais tu vas leur parler anglais, non ? Je vais pouvoir parler à mes petits-enfants ? ». Lori Saint-Martin a dit oui et elle s’est remise à parler l’anglais avec son fils. La naissance de ses enfants lui a permis de faire la paix avec sa mère, avec ses origines et de sortir de la colère qui l’habitait. Elle a pris conscience des barrières sociales qui limitaient ses parents.

     

     

    Cet ouvrage est un mélange entre récit autobiographique et essai. Lori Saint-Martin traite aussi de l’apprentissage des langues, du fait de changer de langue et du bilinguisme. A partir de son cas, de celui de ses enfants et d’autres personnes, elle montre que les bilingues ne pensent ou ne se comportent pas de la même façon selon qu’ils évoluent dans l’une ou l’autre de leurs langues.

    En 2016, à l’occasion d’un voyage à Berlin, Lori Saint-Martin retrouve un souvenir enfoui : sa ville natale, Kitchener, s’est appelée Berlin jusqu’à la première guerre mondiale, elle était peuplée de migrants d’origine allemande, trois de ses grands-parents parlaient allemand. L’autrice découvre l’allemand comme sa langue fantôme et lie ce passé enfoui à la façon dont elle a voulu rejeter l’anglais.

     

     

    J’ai apprécié la lecture de cet ouvrage. J’ai été émue par ce que dit Lori Saint-Martin de sa réconciliation avec sa mère et sa sœur. J’ai trouvé intéressante la réflexion sur les langues.


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  • Maryse Condé, Ségou 1, Les murailles de terre, Robert LaffontL’écrivaine guadeloupéenne Maryse Condé est morte le 2 avril 2024. Elle était née en 1934 dans une famille de la bourgeoisie guadeloupéenne qui a élevé ses enfants dans l’amour de la culture française et l’ignorance de leur ascendance africaine. Elle découvre l’esclavage et la colonisation alors qu’elle est en classe préparatoire à Paris. Elle refusait les carcans identitaires et les étiquettes, en désaccord avec la créolité mais pour la liberté de création des auteurs antillais. Elle ne se considérait pas comme une romancière francophone, elle écrivait en « Maryse Condé ». En cela elle me fait penser à Mohamed Kacimi.

     

     

    Maryse Condé, Ségou 1, Les murailles de terre, Robert LaffontLes murailles de terre. A la fin du 18° siècle, Ségou (Mali actuel) est un royaume puissant le long du fleuve Joliba (Niger). C’est là que vit Dousika Traoré avec ses épouses, concubines et esclaves, ses fils. Conseiller du Mansa (le roi), Dousika est victime d’une cabale et disgracié au moment où son fils aîné se convertit à l’islam. Les Bambaras sont en effet des animistes et pratiquent traditionnellement une religion où l’on se méfie en permanence des esprits malfaisants. Ces derniers rodent principalement la nuit, moment de toutes les terreurs. On a affaire à des forgerons-féticheurs pour les empêcher de nuire, interpréter les signes de l’invisible et du visible et tenter de prévenir les événements défavorables.

    Ce roman se déroule dans la période où l’islam s’impose peu à peu en Afrique de l’ouest et le lecteur suit les étapes de cette conquête, souvent très violente. L’autrice envoie les quatre fils de Dousika dans tout l’ouest de l’Afrique, du Maroc au golfe de Guinée et même au-delà, ce qui lui permet de présenter une grande fresque de l’histoire de ces régions entre 1797 et le milieu du 19° siècle.

     

     

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  • Cécile Baudin, Marques de fabrique, 10-18Ain, 1894. Claude Tardy est une jeune inspectrice du travail. En tant que femme elle ne peut inspecter que les entreprises où travaillent femmes et enfants. Aussi, avec l’accord de son supérieur, Edgar Roux, un vieil homme fatigué, elle se travestit en homme pour pouvoir le soulager dans les ateliers où la main d’oeuvre est masculine. A trois mois d’intervalle, aux deux bouts du département, dans deux entreprises différentes, Claude et Edgar tombent sur les cadavres de deux jeunes ouvriers se ressemblant comme des sosies, l’un suicidé, l’autre accidenté. Coïncidence ?

     

     

    Dans l’Ain également, la religieuse sœur Placide encadre les jeunes ouvrières au sein de l’usine-pensionnat des soieries Perrin. Les jeunes filles qui travaillent ici, principalement des orphelines, sont menées à la baguette par des religieuses chargées de veiller à leur bonne moralité. Leur salaire est mis de côté pour constituer un pécule qui leur sera restitué à leur départ. Soeur Placide est bouleversée quand elle découvre qu’une nouvelle arrivante ressemble comme deux gouttes d’eau à Léonie, une pensionnaire à laquelle elle s’était attachée, partie 15 ans plus tôt pour se marier et qui ne lui a plus donné de nouvelles. Pourrait-il y avoir un lien entre Léonie et la petite Victorine ?

     

     

    Deux mystères avec, au départ de chacun, des personnes qui se ressemblent fort, toutes orphelines et, au début de ce roman, deux histoires menées en parallèle, un chapitre sur deux, jusqu’au moment où -je l’attendais- les deux histoires n’en forment plus qu’une. C’est à ce moment que le roman qui se traînait un peu devient palpitant, à grands coups de rebondissements et trouvailles rocambolesques qui nous mènent à un dénouement que je trouve peu crédible. Le principal intérêt de cette lecture pour moi est la présentation des ouvriers et ouvrières dans l’Ain à la fin du 19° siècle. Outre l’usine-pensionnat, l’autrice nous présente l’exploitation de la glace du lac de Sylans (passionnant) et des mines de phosphate (pas mal aussi).

     

     

    Cette lecture me permet donc de participer au défi Lire sur le monde ouvrier organisé par Ingannmic.

    Cécile Baudin, Marques de fabrique, 10-18


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  • Guy Goffette, Géronimo a mal au dos, GallimardLe poète et éditeur belge Guy Goffette est mort le 28 mars 2024. Il était né en 1947 dans une famille ouvrière repliée sur elle-même, battu par son père. Il a été d’abord enseignant puis éditeur, poète, écrivain.

     

     

    Guy Goffette, Géronimo a mal au dos, GallimardGéronimo a mal au dos. Simon, le narrateur, revient dans la maison de ses parents à l’occasion du décès de son père Georges, dit Géronimo. C’est l’occasion pour lui de se remémorer son enfance douloureuse : Simon a été un enfant battu, recevant ses torgnoles quasi quotidiennes. Il a souffert de grandir dans un foyer sans tendresse ni gestes d’affection. Il reproche enfin à ses parents leur pingrerie maladive.

    Simon a tenu grâce à son amour des livres -interdits à la maison- et de la nature environnante -ce dernier partagé avec son père. A l’âge adulte il a quitté cette famille qui l’étouffait et a cherché l’amour ailleurs. Il est passé de femme en femme, il a voyagé, il a évité les réunions de famille, ce que lui reprochent ses frères et sœur. La mort de son père l’a ramené sur les lieux de son enfance où il revisite ses souvenirs à la recherche de preuves que celui-ci l’aimait malgré tout.

     

     

    Je comprends que ce père s’est conformé à un modèle social de pater familias à qui on doit respect et obéissance. Ce faisant il a rendu son fils malheureux et s’est privé lui-même d’une relation apaisée avec celui-ci. Il me semble que la rigidité du père a poussé le fils à se comporter en rebelle. Devant le cercueil de Géronimo les sentiments de Simon sont très ambivalents, mélange de rancoeur, de fierté pour l’homme juste qu’était son père à l’extérieur de la famille, de pitié pour le vieillard invalide qu’il était devenu. Je souhaite au narrateur que ses réflexions lui apportent un apaisement.

     

     

    Ce livre est dédié « A l’homme de ma vie, Géronimo, mon père ». Ce que je lis par ailleurs sur Guy Goffette me confirme que cet ouvrage est fortement autobiographique. L’auteur analyse finement les sentiments de son personnage, c’est un texte émouvant et fort bien écrit. Pas de doute, l’auteur était poète.

     

    L'avis de Keisha.


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  • Mohamed Kacimi, L’Orient après l’amour, Actes sudMohamed Kacimi est né en 1956 à El-Hamel près de Bou-Saâda, en Algérie, dans une zaouïa, un lieu saint soufi, fondée au milieu du 19° siècle par un de ses ancêtres. L’auteur est donc issu d’une aristocratie religieuse éclairée. A l’école il découvre la langue française, découverte fondamentale pour lui : « Cette langue était donc humaine, vulnérable, elle était langue d’enfants et de rêves. Elle m’a permis, pour la première fois, d’utiliser la première personne du singulier, « Je », sans la faire suivre de la traditionnelle formule : « Que Dieu me préserve de l’usage d’un pareil pronom, car il est l’attribut du diable. »

    A partir de ce jour allait commencer ma longue transhumance vers un autre imaginaire.
    Je n’ai point quitté une langue maternelle mais une langue divine. La langue français est devenue pour moi la langue natale du Je, langue de l’émergence pénible du Moi. Il ne s’agit point de bilinguisme, ni de déchirement. Le partage est clair. A ma langue d’origine je donne l’au-delà et le ciel ; à la langue française, le désir, le doute, la chair. En elle, je suis né en tant qu’individu. (…)
    Je n’écris pas en français. J’écris en « moi-même ». »

     

     

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  • Kaoutar Harchi, Comme nous existons, BabelNée en 1987, Kaoutar Harchi est chercheuse en sociologie. D’origine marocaine, ses parents, Hania et Mohamed, ont émigré en France avec leurs propres parents quand ils étaient encore enfants. Dans ce récit l’autrice raconte sa jeunesse d’enfant de l’immigration dans un quartier populaire de Strasbourg.

    Des parents aimants qui, par le contournement de la carte scolaire, ont voulu extraire leur fille de son milieu d’origine, la protéger d’un danger jamais nommé qui me semble surtout fantasmé par les Français. En 6° Kaoutar Harchi est inscrite dans un collège privé catholique du centre ville. Elle s’y trouve confrontée au racisme conscient ou inconscient de camarades et de professeurs, assignée à ses origines.
    Des vacances au pays où l’autrice découvre ses parents sous un autre jour, épanouis dans leur famille élargie tandis qu’elle se languit du retour.

     

     

    En terminale, alors qu’elle n’a encore aucune idée de l’orientation qu’elle veut suivre, Kaoutar Harchi découvre un texte du sociologue algérien Abdelmalek Sayad. Cette lecture est une révélation qui éclaire de façon réjouissante tout ce qu’elle présentait, à travers sa famille, de la place des travailleurs immigrés en France : elle fera des études de sociologie. A l’université elle fréquente des étudiants d’origine maghrébine comme elle, jeunes dont elle avait été tenue écartée jusque là par sa scolarité dans le privé. Elle prend conscience, rétrospectivement, d’un manque.

    Le récit se termine quand l’autrice quitte le domicile parental pour aller poursuivre ses études en master à Paris. Ce départ est vécu par elle comme une émancipation alors même qu’elle souhaite garder sa relation privilégiée avec ses parents. Elle exprime l’ambivalence de ses sentiments.

     

     

    J’ai apprécié cette lecture. J’ai trouvé intéressant ce mélange de récit autobiographique et d’étude sociologique. C’est un ouvrage court qui se lit vite. Le style se veut descriptif, détaché, mais néanmoins on sent bien le très fort attachement qui lie l’autrice à ses parents.

     

     

    L’avis d’Henri.


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